Claire Levacher©Masha Mosconi
Une vocation menée par cœur
Retour en arrière. Depuis toujours Claire Levacher “rêve la musique”. Sa “source musicale” c’est le piano pour lequel elle éprouve une grande passion de l’âge de six ans à sa douzième année. A l’adolescence Claire Levacher éprouve l’impérieuse envie “d’ouvrir le son “ à la musique de chambre puis, entre douze et quatorze ans, manifeste sa volonté d’être cheffe d’orchestre.
Dès lors, elle va étudier l’harmonie, le violoncelle, la flûte à bec. Ce qui lui importe est déjà de jouer ensemble. Très vite, toujours soucieuse “d’élargissement musical”, cette artiste est persuadée, encouragée par ses maîtres, que son désir de s’épanouir passe par la compréhension méthodique de l’œuvre. De nouveau l’harmonie, le contrepoint, l’analyse et diverses rencontres vont ainsi nourrir ses intentions. Tout cela continue de l’animer dans son travail d’interprète et de pédagogue.
Passionnée, persévérante, audacieuse et confiante, c’est aux Etats-Unis qu’elle décidera de “passer à l’action” , dans le Michigan, afin de se mettre “dans le bain” et d’oser diriger des ensembles d’universités. Ses instruments de cœur. Et puis suivra, au bout de tout cela, au bout d’un certain temps, le désir de la “réconciliation” entre l’école de l’énergie et la scrupuleuse étude. En vérité, celle qui a pu se trouver dans le feu, reprend avec âme et flamme ses marques personnelles et le trajet académique, le chemin jamais perdu de vue d’aller au plus profond des œuvres et de retrouver ses outils d’interprétation.
Le désir du partage
Charismatique et d’une grande humilité, Claire Levacher, à l’aura internationale incomparable, parle à merveille du rapport troublant au temps et du désir de partager:“Ce que je trouve unique en tant que cheffe d’orchestre, est que l’on doit stimuler une intention et se trouver dans le même temps dans celui de la réponse. On anticipe, on écoute mais nous n’avons cependant rien de surhumain. Nous n’avons seulement qu’une connaissance de la partition. Nous en éprouvons une idée et ce qui qui prime est de la transmettre aux musiciens qui vont me traverser et offrir l’œuvre au public. Nous sommes de dos, être chef d’orchestre n’est qu’un métier de transmetteur, le son de l’orchestre vous traverse pour atteindre le public d’une manière vivante.”
Pour la beauté du métier et du programme
Quant au programme de ce ce nouveau concert de l’Orchestre d’Orléans ? “J’aime ce Strauss de fin de vie, très chambriste avec un recul classique très intimiste. Quant à L’Héroïque, symphonie de Beethoven, elle occupe une position charnière et monumentale par son invention. C’est l’œuvre la plus longue qui puisse être et nous allons tenter d’en faire un peu moins de cinquante-cinq minutes. Elle est révolutionnaire, osée, et brille par son inventivité.
Dans ce programme nous irons ainsi crescendo et c’est un challenge de monter cette pièce en si peu de temps. Le premier mouvement de cette symphonie est, côté chef et musiciens, l’une des plus difficiles du répertoire. C’est une grande structure, un tribut à payer, l’œuvre d’un génie inventif offrant une variations d’orfèvrerie de détails. Ce mouvement, on le sent passer, mais cela fait partie de la beauté du métier de se confronter à cela. “
Hommage à l’orchestre et au soliste
Comment se déroule la relation avec le soliste, demandons-nous à Claire Levacher, le temps d’une pause dans les bureaux de l’Orchestre d’Orléans, rue Pothier, à deux pas de la cathédrale ? Réponse attentive: “Diriger est pour moi, avec un soliste musicien comme avec les chanteurs, un partage. J’aime bien cette notion d’être au service. Mais être au service c’est aussi accompagner, guider, c’est une conversation, une rencontre qui dépend de nos état respectifs.”
Que pense-t-elle de cet
Orchestre symphonique d’Orléans avec qui, ce mardi, elle vient de réaliser des répétitions avec différents pupitres et un premier tutti qu’elle a adoré effectuer devant des enfants des écoles écoutant bouche bée?
“Ce qui est important est la rencontre humaine. Je sens un groupe très uni qui a vécu beaucoup de choses ensemble. Il y a là une vraie force de groupe. Ce qui les réunit c’est l’enthousiasme, cela saisit tout de suite et provoque immédiatement un attachement.”
Rejoindre l’esprit du compositeur
Existe-t-il une signature féminine de la direction d’orchestre ? Claire Levacher: “Je ne le crois pas. L’interprétation est avant tout musicale et nous espérons toujours rejoindre l’esprit du compositeur, dépasser notre propre figure. Le travail invisible est essentiel, c’est ce qui prime, ainsi qu’une vérité que l’on essaie d’atteindre. Il ne faut pas confondre le travail du chef et l’incarnation. Le chef n’est qu’un transmetteur, un vecteur qui fait lien. Seul compte l’appel de la musique.”
Voici ce que nous dit ainsi une grande dame qui tire les mélomanes par l’oreille et qui prend sereinement l’orchestre par la main. Le conduisant comme en communion.
Avec une sérénité souriante, ouverte et confiante, à nulle autre pareille.
Jean-Dominique Burtin
“Cor à Corps”: un impressionnant programme
Figure au programme de ce nouveau concert de l’Orchestre symphonique d’Orléans: la Pavane opus 50, de Gabriel Fauré, pièce pour petit orchestre symphonique avec chœur; le Concerto n°2 pour cor en mi bémol majeur de Richard Strauss avec Felix Dervaux, cor solo; la Symphonie n°3, dite “Symphonie héroïque”, de Beethoven.
Les informations pratiques
Samedi 11 janvier à 20 h 30, dimanche 12 janvier à 16 heures.
Salle Touchard, Théâtre d’Orléans.
Avant-concerts: “En avant Beethoven !” par les élèves des classes de Jean-Philippe Bardon et de Jean-Renaud Lhotte, du Conservatoire à rayonnement départemental d’Orléans.
Réservations au Théâtre d’Orléans, jusqu’à samedi de 13 heures à 19 heures. Tel. : 02.38.62.75.30. à partir de 14 heures.