Rami J4 : un piano tournant, de douces flûtes et un poème très noir

Les Rami arrivent en milieu de parcours. Une soirée bien remplie en ce jeudi 24 octobre, qui a débuté par une expérience de musique tournante dans le hall du théatre. Puis salle Vitez, un flûtiste chevronné a emmené le public sur ses terres dispersées au quatre coins du monde, suivi d’un set tragique illuminé de l’intérieur par un guitariste plus que célèbre.

Vincent Viala cl Marie Line Bonneau

Une expérience quasi physique

Le public venu à 19h écouter Vincent Viala l’a bien entendu, mais ne l’a pas vu ! Terence Briand et Sebastien Bedrunes étaient bien dans le hall, assis à leur console informatique, et le public debout se laissait entourer par les notes de Vincent qui, lui, jouait tout au bout du corridor menant aux entrées de la salle Touchard. Car tel est le dispositif du soundarium, arène sonore de ce hall bardé de hauts parleurs qui permettent aux ingés son de faire tourner la musique.

Et même si le public s’est retrouvé face à lui même, en rond dans ce hall vide, ce qui est en soi une expérience !,la magie a très vite opéré. On sait Vincent Viala excellent pianiste ; il nous a emmené très loin avec une aisance étonnante. Dans un grand set digne des pianistes solo du XXe siècle, il a captivé son auditoire par l’intériorité de sa prestation. Et la mise en perspective du dispositif sonore donnait une profondeur incroyable à son jeu, apportant une spiritualité encore plus intense. Une heure d’une expérience musicale à vivre qui se renouvellera vendredi avec le guitariste Cédric Perras.

Fou d’anches et de sonnets

A 20h30, Didier Malherbe est entré seul sur la scène de la salle Vitez. Seul, mais avec une dizaine d’instruments, à anches bien sûr. Car il est fou d’anches. Et de sonnets. Donc de sonnets parlant d’anches. Il nous en a lu quelques uns, pleins de jeu de langue, de sons des mots, de rythmes de langage. Et il a joué de ses flûtes rapportées du monde entier. Du doudouk d’Arménie, bien sûr, ce qu ‘on savait déjà pour l’avoir entendu au sein du Hadouk Trio qu’il formait il y a une dizaine d’années. Mais aussi des flûtes chinoises, une incroyable flûte laotienne avec 16 anches, donc autant de tuyaux et de sons soyeux. Cet homme a derrière lui un bagage de musicien rock comme jazz, mais a laissé tombé les lourds saxos pour des instruments légers comme un chant d’oiseau.

Didier Malherbe cl Marie Line Bonneau

Et des toupies qui tournent sur un tambour le ravissent au point d’en proposer une pièce en plusieurs actes. Cette heure de « flute salad », comme il jouait sur Angel’s Egg de Gong en 1973 de manière prémonitoire, a été délicieuse. L’homme, sa musique, sa poésie et ses mots apportent un grand plaisir. De la bonne herbe !

Un texte sombre

Et lui a succédé un étonnant trio pour un grand morceau récité par Margarida Guia et par Krzysztov Styczynski qui l’a écrit, accompagnés à la guitare par Serge Teyssot-Gay. C’est en effet avec Noir Désir, qui avait travaillé avec Krzysztov en 2002 pour une carte blanche à Montpellier, qu’ils avaient mis au point ce long poême. Mais c’est finalement un texte de Bertrand Cantat, « Nous n’avons fait que fuir », qui a été joué au cours du concert. Pourtant, ce texte « Des millions de morts se battent entre eux » a été enregistré et retransmis par France Culture. Ambiance catastrophique, noirceur des images (« Au dehors l’agonie, au dedans le cancer »), trop de chocs de mots qui tuent le propos.

Serge Teyssot-Gay cl Marie Line Bonneau

Sorte de catalogues d’idées un peu générales et souvent superficielles, un peu adolescentes (« S’intégrer, c’est se désintégrer »), le propos n’est pas très prenant. D’autant que la voix de Margarida ne passe pas toujours la rampe.

Une guitare brillante

Dommage. La guitare de Serge reste époustouflante, maniée de main de maitre dans des subtilités innovantes, tenues, sensées. Une très belle prestation musicale qui fait d’autant plus regretter celle du couvent des Ursulines de Montpellier et ses fulgurances signées Cantat : « Nous n’avons fait que fuir, nous cogner dans les angles. Nous n’avons fait que fuir Et sur la longue route des chiens resplendissants deviennent nos alliés. »

BC

“Soundarium”

Piano Vincent Viala
Mise en son: Terence Briand

“Des mots des flûtes”

Didier Malherbe

“Des millions de morts se battent entre eux”

Guitare: Teyssot-Gay
Voix Margarida Guia
Voix: Krzysztov Styczynsk

Le Programme des RAMI

Attention: il reste des places pour le concert événement de Brigitte Fontaine dimanche à 17 h 30: pour réserver

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