Dans toutes démocraties, le mode de scrutin détermine les règles qui permettent, à partir de diverses opinions, d’arriver à une décision ou une désignation collectivement approuvée. Force est de constater qu’aujourd’hui la moitié de l’électorat français ne vote plus. Devant cette désaffection délétère des électeurs, il est nécessaire de remettre en cause le vote majoritaire actuellement utilisé.
La moitié de l’électorat ne vote plus
Un vote par défaut
Dans le scrutin majoritaire, les participants sont forcés de désigner un candidat sans possibilité d’émettre un avis pondéré et nuancé. Par ailleurs, trop souvent la désignation du gagnant final dépend de la présence ou de l’absence de candidatures mineures. Le bénéficiaire du vote majoritaire est fréquemment celui qui est le moins rejeté par les votants. C’est un vote par défaut qui malheureusement décourage de nombreux suffragants insatisfaits et aggrave l’abstention.
Évaluer les mérites de chacun des candidats
Afin de faire revenir les électeurs et fortifier la démocratie, il est nécessaire d’élargir le mode d’expression des diverses opinions. Parmi les citoyens qui se déplacent encore vers leur bureau de vote, nombreux sont ceux qui acceptent de choisir un seul prétendant parmi tous. Reconnaissons néanmoins que d’autres souhaitent soutenir plusieurs candidats ou désigner stratégiquement le moins mauvais en votant « utile » et que certains n’apprécient guère le postulant pour qui ils ont néanmoins donné leur bulletin. Désabusés de plus en plus d’électeurs votent blanc ou nul. Tous ces choix doivent pouvoir s’exprimer. Proposer plus de latitudes aux citoyens en leur permettant d’émettre, lors de leur vote, plus d’appréciations est démocratiquement efficient. Une solution serait d’évaluer les mérites de chacun des candidats par une échelle d’opinions. En un seul tour, ces jugements exprimés permettraient de classer les compétiteurs. L’élu serait celui qui est le mieux apprécié par les participants à l’élection. Cette méthode est également valide pour d’autres types de choix.
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Le jugement majoritaire
Afin qu’un vote soit authentiquement démocratique, opérationnel et son résultat acceptable, il convient que la méthode utilisée remplisse certaines conditions :
- à la conclusion du vote, un seul vainqueur est désigné ;
- tous les candidats et tous les électeurs doivent être traités à égalité ;
- la personne élue doit être effectivement collectivement choisie ;
- le vote terminé, le lauréat ne peut être remis en cause.
Une technique électorale remplie ces conditions de désignations démocratiques et met en place une meilleure expression des électeurs. C’est le jugement majoritaire inventé par Michel Balinski et Rida Laraki en 2007. Méthode qui semble fortement incitative à participer au vote. Dans une étude publiée en avril 2011, le think tank Terra Nova préconise ce nouveau mode pour l’élection présidentielle http://tnova.fr/system/contents/files/000/000/698/original/Rapport_-_Moderniser_l%27_lection_pr_sidentielle_-_Olivier_Ferrand_0.pdf?1436782427.
Mode d’emploi du jugement majoritaire
Le jugement majoritaire (https://fr.wikipedia.org/wiki/Jugement_majoritaire) est plurinominal et à un seul tour. Les électeurs utilisent un bulletin à sept colonnes (parfois moins) où figurent dans chacune d’elles une appréciation : Excellent – Très bien – Bien – Assez bien – Passable – Insuffisant – A rejeter – avec autant de lignes que de candidats. Les votants émettent une seule appréciation par postulant. Les candidats non évalués reçoivent la mention « A rejeter ». Un électeur peut donner la même mention à plusieurs candidats. Le dépouillement consiste à déterminer quelle est la mention majoritaire de chaque candidat, c’est-à-dire la mention soutenue par une majorité contre toute autre mention. C’est celui qui a la meilleure appréciation majoritaire qui est élu. De nombreux outils informatiques existent pour automatiser et simplifier le dépouillement.
Appliquer le jugement majoritaire aux élections municipales
Les promesses de rompre avec les mœurs politiciennes anciennes
Parmi les différents groupes qui se préparent pour les prochaines élections municipales orléanaises, seul Orléans-Ensemble utilise le jugement majoritaire pour ses décisions internes (http://orleans-ensemble.fr/2019/10/orleans-ensemble-nos-modes-de-prises-de-decision/). Ce collectif milite pour que ce soit la méthode utilisée pour la prochaine gouvernance de la ville. Malgré les belles promesses de rompre avec les mœurs politiciennes anciennes, à gauche comme à droite, nous observons des combats de petits chefs pour être tête de liste. Le jugement majoritaire est un système qui modère les égos et supprime les tractations malsaines. Malheureusement, les ambitions et le manque d’humilité de certain(e)s risquent fort d’empêcher l’usage du démocratique jugement majoritaire.
« Rex eris…si recte facies » (Horace)
JPB