A l’inverse de Versailles, Sacha Guitry aurait eu bien du mal à nous conter Chambord. Ce château, bâti au milieu de nulle part, autour d’un escalier unique à double révolutions, à partir d’un édifice civil guidé par une croix grecque, est encore un mystère. Léonard de Vinci dont on fête les 500 ans en même temps que cette folie construite au milieu de rien, en bord de Cosson voulue par son protecteur François 1er, y a mis sa patte géniale, mais on ignore même encore si le locataire du Clos Lucé y fit plus que les plans de cette volée de marches de tuffeau.
Le Baroque nomade.@EB
Directeur du domaine de Chambord, Jean d’Haussonvillle, qui depuis son arrivée s’est donné comme mission de « meubler » le château, notamment de splendides tapisseries emblématiques de la Renaissance ou une immense armure de l’époque , a jeté un froid légitime par la chaude soirée qui marquait l’opération de mécénat Orange qui a participé à l’exposition des 500 ans : « Cet anniversaire, c’est émouvant mais ce chef d’œuvre aussi est fragile souvenons-nous de ce qui est arrivé à Notre-Dame ».
La fierté de notre territoire
Pour Jean d’Haussonville, « Chambord c’est la fierté de notre territoire, une icône de la France…c’est un témoignage du passé mais tourné vers l’avenir depuis cinq siècles ». « L’objectif de ces deux cabinets c’est la médiation et la découverte pédagogique du château à destination des familles et des enfants », explique le directeur du château. Lors de l’inauguration de l’exposition des 500 ans, il avait dit de ces feuillets, ces codex de Léonard, « ils sont la représentation de la pensée de Léonard de vinci, un dialogue à travers 5 siècles qui représentent ses sources d’inspiration, une introspection de la genèse de Chambord ». Parmi les quelques 700 manifestations qui marquent les 500 ans de Chambord et de Léonard, l’exposition « l’utopie à l’œuvre » qui a été inaugurée le 25 mai dernier montre pour la première fois en France les dessins originaux du Codex Atlanticus de Léonard de Vinci, trois feuillets inestimables que l’Italie a eu bien des réserves a prêter à la France. Ils viennent de la Veneranda Biblioteca Ambrosiana Pinacoteca de Milan.
Les cabinets de curiosité
L’armure de François 1er et le “roi” d’Orange grand ouest, Pierre Jacobs.
A la tête de quatre régions (Normandie, Bretagne, Centre-Val de Loire, Pays de la Loire), Pierre Jacobs, directeur interrégional d’Orange a investi 45 000 euros dans deux cabinets de curiosité du château. « Une grande entreprise comme la nôtre a un rôle à jouer pour marquer notre présence dans le territoire. Notre rôle sociétal va bien au-delà de la vente de téléphone. C’est la preuve qu’Orange n’est pas une entreprise tout à fait comme les autres ».
Phiipppe Villiers, le récitant.
Car Chambord, fraîchement entouré de jardins à la Française grâce à un mécène américain, et son parc giboyeux ceint du plus grand mur de France, 32 km, bat toujours au rythme de l’histoire contemporaine. François 1er le voulut château de la chasse et des femmes. Mitterrand et Kohl y tinrent un sommet franco-allemand mémorable, grands chasseurs Pompidou y fut le Président préféré des personnels, Giscard n’y tirait pas, dit-on, que du gibier pas plus que François 1er, et plus récemment Emmanuel Macron en y fêtant dans un gite son anniversaire puis et en y recevant le président italien Sergi Mattarella, a poursuivi le rôle diplomatique que nos Républiques lui ont toujours confié..
Le Baroque Nomade
Le Baroque Nomade
Ne restait plus jeudi, soirée du mécène Orange qu’à parapher le partenariat entre les deux géants, l’un de la Renaissance et l’autre du numérique. Puis de se retrouver dans le cadre du festival, dans la salle récemment rénovée à l‘acoustique parfaite où l’ensemble « Le Baroque nomade » a donné un « Roi du bois, roi des voix » qui a marié harmonieusement des madrigaux délicieux de Monteverdi où l’Italien prouve qu’il est la langue du Bal canto par essence, servie par deux remarquables jeunes ténors Francisco Manalich et François Joron et trois musiciens du même tonneau, Andréas Linos (viole de Gambe) Remy Cassaigne (Luth) et Mathieu Depouy (clavecin). Tout l’art de La Baroque nomade qui sillonne le monde et ses musiques anciennes, a consisté jeudi soir, où elle donnait pour la première fois “Le Roi du bois”, à nous transporter du côté de Mantoue entre deux madrigaux en alternance harmonieuse se jouant du temps, avec un texte de l’écrivain contemporain Pierre Michon servi à merveille par le récitant Philippe Villiers.
A Chambord, château de la République comme en France entière, tout fini par un concert.
Ch.B