Colette Magny, le combat continue au Théâtre d’Orléans

Les Loges production propose ce mardi soir 28 mai au Théâtre d’Orléans un récital dédié à la chanteuse Colette Magny avec la voix de Lila Tamazit accompagnée au piano par Vincent Viala et à la rythmique David Georgelet. Colette Magny, chanteuse des années 70-80, boudée par les médias et le show-biz, accompagna de ses chansons rebelles bien des combats militants de l’époque, dénonçant la guerre du Vietnam ou les dictatures grecques et espagnoles, ou parlant de la condition ouvrière et du combat des femmes.

Entre deux répétitions, la chanteuse Lila Tamazit nous parle ici de son lien personnel avec Colette Magny, et pourquoi elle a choisi de ré-interpréter ses chansons.

Lila Tamazit en répétition

Interview

GP Lila, pourquoi avoir choisi d’interpréter les chansons de Colette Magny ?

LT  Lorsque j’ai découvert Colette Magny, elle m’a secouée déjà par sa voix, parce que je trouvais qu’elle avait une voix hors normes, très particulière, très forte, et quand j’ai commencé à découvrir ses chansons, je me suis rendue compte que ce qu’elle chantait, les thèmes qu’elle défendait étaient des thèmes qui me parlaient.
C’est quelqu’un qui n’est pas centrée sur elle même, il y a toujours quelque chose de l’ordre du souci de l’autre dans toutes ses chansons: sauf quelques chansons très rares où elle parle d’elle ou de son enfance, tout le reste de son répertoire est vraiment axé sur les autres, sur la difficulté qu’elle a de vivre dans ce monde trop cruel et ça me touche parce que j’ai moi aussi une histoire personnelle et ça rejaillit sur moi quand elle parle de la guerre, de la précarité, de la position de la femme dans la société.

GP Colette Magny a pourtant un style de chant très original ?

LT Ce qui m’a immédiatement plu la première fois où je me suis attaquée à son répertoire c’est que justement il n’y avait aucune limite et ce que j’ai aimé c’est cette façon qu’elle a, d’être vraiment libre: même musicalement, elle n’est pas dans une structure définie, Colette a quelque chose à dire, à défendre, elle va écrire un texte, elle va s’en emparer et elle peut complètement se détacher de la rythmique, elle peut crier, hurler, clamer, chanter fort, parfois avec violence, mais toujours pleine d’espoir et avec beaucoup de tendresse et de poésie, et moi qui suis sensible aussi, ça m’intéresse.
Ce n’est pas juste être en colère, parfois à la limite du supportable, et en écoutant certains albums on est obligé de faire des pauses tellement c’est prenant, mais il y a toujours cette humanité qui est là qui me touche et qui me secoue, et je me sens proche d’elle, de ce qu’elle dit et de ce qu’elle défend avec férocité et en même temps avec générosité.

GP Ses combats politiques datent des années 70, comment les avez-vous actualisés ?

LT C’est finalement facile dans le sens que les problèmes qu’elle évoquait dans ses chansons et pour lesquels elle se battait dans sa vie, c’est des sujets qui sont toujours d’actualité aujourd’hui: son combat d’alors c’est encore un peu le combat de nous tous et on continue à se battre pour la parité, contre la précarité, pour le féminisme, l’écologie, elle en parlait déjà dans toutes ses chansons.
Aujourd’hui on est toujours en plein dedans .
Et c’est pour cela que je sentais une espèce d’urgence de me replonger à nouveau dans le répertoire de Colette Magny. Je dis à nouveau parce qu’il y a huit ans, j’avais déjà monté un projet autour de Colette Magny que je ne reprends pas cette année de la même façon,  mais ça me revient comme un boomerang et je me dis qu’il faut que je recommence, que je me replonge dedans, que je continue à chanter Colette Magny, parce que ce qui se passe en ce moment me touche vraiment: je suis quelqu’un d’un peu angoissé et Colette me fait du bien parce que je ressens aussi de la colère et son répertoire est idéal pour exprimer musicalement et avec des mots la rage qu’elle avait et dans laquelle je me retrouve.

Propos recueillis par Gérard Poitou