Une des mesures les plus symboliques des annonces que devait faire Emmanuel Macron lundi jour de drame national et qu’il annoncera sans doute jeudi, figurait la suppression de l’ENA. Hélène Mouchard Zay nous rappelle que son père, l’Orléanais Jean Zay, est à l’origine du projet d’Ecole National d’Administration.
Jean Zay, ministre de l’Instruction publique et des Beaux arts.
“Quel enfant du peuple a jamais pu être ambassadeur ?
L’origine du projet de création de l’ENA appartient au Front Populaire, dont la préoccupation était d’assurer le recrutement démocratique des hauts fonctionnaires.
Le projet de loi “autorisant la création d’une Ecole nationale
d’administration relevant directement du ministère de l’Education
Nationale” a été déposé sur le bureau de la Chambre, le 1er août 1936,
par Jean Zay, alors ministre de l’Education Nationale et des Beaux-arts.
Il s’attaquait ainsi au monopole de l’Ecole libre des Sciences
Politiques (privée), et il rencontra de vives résistances. Après une
longue négociation, le projet sera voté en 1938 par la Chambre des
Députés, à une large majorité. Mais il sera bloqué au Sénat, et la guerre éclate en septembre 1939…..
Dans le livre qu’il écrit en 1942 dans la prison où l’avait jeté Vichy,
( Souvenirs et Solitude, Belin, p.268 ), Jean Zay rappelle que
l’objectif du projet de loi était de garantir « le principe de
l’égalité des enfants devant l’instruction et au seuil des carrières
publiques. Le savoir et l’intelligence n’étaient plus les seuls à
conditionner l’accès à toutes les fonctions. Il y fallait souvent la
fortune, la naissance. Quel enfant du peuple a jamais pu être
ambassadeur?…”.
A cette date, stigmatisant « le manque de caractère dont ont fait preuve
tant de hauts fonctionnaires républicains depuis juin 1940, la facilité
avec laquelle ils ont subi les nouveaux maîtres, assumé sans révolte de
conscience toutes les besognes qu’on leur imposait », Jean Zay souligne
la défaillance de la République qui « avait négligé de surveiller leur
recrutement, d’assurer elle-même leur formation ». Et cette République,
ajoute-t-il, « ils ne l’ont pas défendue ».
L’ENA a reconnu cette paternité puisque, en 1997, un amphithéâtre de
l’ENA- Strasbourg a été baptisé du nom de Jean Zay.”
Hélène Mouchard-Zay