A moins d’un an du scrutin local de mars prochain, le décor politique est planté même si les acteurs définitifs ne sont pas encore connus.
La mairie d’Orléans.
La coupe est pleine : à un an des prochaines municipales les candidats déclarés ou en passe de l’être sont pléthore pour occuper le fauteuil de maire. On y trouve bien sûr Olivier Carré qui veut rempiler mais aussi Jean-Philippe Grand, Philippe Rabier, Tahar Ben Chaabane, Baptiste Chapuis, Richard Ramos mais aussi la France Insoumise qui n’a pas désigné de tête de liste tout comme la République en Marche. Il pourrait aussi y avoir le Parti communiste (Michel Ricoud ou Dominique Tripet), le Rassemblement national, voire les Patriotes de Philippot ou Lutte Ouvrière qui manque rarement ce rendez-vous politique en considérant que constituer une liste de 55 noms relève de l’épreuve de force. Et c’est sans présumer d’autres ambitions : Serge Grouard, Nathalie Kerrien, Olivier Geffroy, Charles-Éric Lemaignen, Florent Montillot entre autres… Bref ce scrutin de moyen terme mobilise toute les énergies (à l’inverse des proches européennes qui ne n’intéressent que peu de monde) avec cependant une antienne-langue de bois bien assumée : « je veux y aller pour rassembler les Orléanais » et « ce qui compte ce n’est pas la tête de liste mais le programme ! ». Cela va mieux en le disant bien sûr…
Passons donc en revue les différentes hypothèses.
Olivier Carré en position délicate
Olivier Czrré et le Premier ministre.(c) Marie-Line Bonneau
Olivier Carré est devenu maire …par la volonté de Serge Grouard élu dès le 1er tour en 2014 mais démissionnaire par la suite. Malgré son long passé politique Olivier Carré devra surmonter de nombreux handicaps : un manque de notoriété, une absence d’investiture, une clarté politique insuffisante, des divisions internes et le front commun de tous ses opposants réunis dans un même objectif « tout sauf Carré ! ».
Le maire a quitté son parti d’origine Les Républicains pour revendiquer son indépendance tout en devenant compagnon de marche d’Emmanuel Macron dont il soutient la liste aux européennes. « Je suis un homme libre a-t-il répété dans nos colonnes je ne solliciterai aucune investiture ». Mais peut-il dans ces conditions mener une liste qui rassemblerait du centre droit au centre gauche (même arc politique revendiqué par nombre de ses opposants) avec des colistiers qui ne sont pas de cette aventure. En clair Les Républicains qui ont tenu la mairie depuis 2001 accepteront-ils de se faire hara-kiri pour soutenir ce maire qui ne fait pas l’unanimité -euphémisme ! – en leur sein. Cela semble inenvisageable car on voit mal Olivier Geffroy, adjoint et patron départemental de LR, s’effacer ainsi. Il se dit même que l’adjoint à la Sécurité n’exclue pas de lâcher Olivier Carré avant la fin du mandat afin de monter une liste LR. Les mêmes observateurs prêtent à Florent Montillot (UDI) le même genre d’ambition!
Grouard en embuscade ?
La liste de 2014 était certes hétéroclite mais avec un affichage politique clairement à droite. Certains des anciens (Martin, Sauvegrain, notamment) accepteront-ils cette glissade au centre, voire à gauche, d’Olivier Carré? C’est ici que Serge Grouard peut jouer un rôle. Certains le poussent à se présenter, lui ne dit rien, muet comme une tombe tout en laissant se répandent les rumeurs qu’il fait alimenter derechef. « Il n’a qu’un obsession ironise Richard Ramos c’est qu’Olivier Carré ne soit pas réélu ! ». Une hypothèse à laquelle ne croit pas le maire « il n’y a pas une déclaration de Serge Grouard qui va dans ce sens ». A moins que cette rumeur -ces infox pour certains- serve à préparer une seconde étape. On dit que Serge Grouard débarrassé de tous ses mandats s’ennuie ferme (et tire la langue financièrement) et voudrait effectuer son retour, plus aux législatives qu’aux municipales d’ailleurs.
Seconde faiblesse du maire : son absence d’investiture avec le risque naturel de devoir affronter une liste LREM dont il se sent proche mais dont il ne peut se revendiquer. Et cela alors même que des membres de son équipe (Nathalie Kerrien, Beatrice Ondulami…) se revendiquent d’En marche. L’opposition serait d’autant plus baroque si cette liste LREM était conduite par son adjointe à la culture à qui il a donc demandé de repartir. On murmure qu’il lui aurait proposé la seconde position comme 1er maire-adjoint ce qui serait malgré tout une belle promotion pour celle qui manque singulièrement d’ancrage politique local. Des anciens socialistes comme Pierre Allorant, doyen de la fac de Droit, devenu figure de la vie politique locale, auraient aussi été sollicités .Enfin l’affaire Soufianne Sankhon qui aurait mélangé ses affaires avec son mandat et qu’Olivier Carré a soutenu mordicus avant de le lâcher n’a pas arranger le climat dans une équipe municipale qu’on dit “éclaté”.
En Marche dans le brouillard
Nathalie Kerrien.
Une partie de la vie municipale repose donc sur les épaules d’En marche dont la référente départementale Jihan Chelly a répété que le parti macroniste présenterait une liste, de préférence menée par une femme. Mais selon une conception singulière de la démocratie locale, la décision finale ne dépend pas des militants locaux mais de la commission nationale d’investiture qui, certes, prend l’avis du terrain. La situation est d’autant plus complexe que Richard Ramos, député du MoDem qui veut quitter Fay-aux-Loges pour Orléans souhaite
Le Président de la République et Richard Ramos (MoDem). Archives Magcentre.
aussi conduire cette liste pro-macron. Et l’ancien blésois qui a su se forger une carrure médiatique depuis l’Assemblée nationale compte bien sur l’entregent de Jacqueline Gourault et Marc Fesneau, bien en cour à l’Elysée, pour décrocher le morceau.
Faudra-t-il alors organiser une primaire (ce qui n’est pas prévu par les statuts d’En Marche mais qui serait bien utile à Paris !) pour départager les prétendants ? Chez certains marcheurs une hypothèse avait germé : une liste bicéphale Olivier Carré-Stéphanie Rist, députée En Marche du Loiret. Proposition qui a fait long feu et qui est désormais unanimement rejetée d’autant plus si Olivier Carré repartait avec les « épouvantails » Olivier Geffroy et Florent Montillot… Les marcheurs locaux pourraient aussi redouter une intervention jupitérienne : et si Emmanuel Macron doté de la grâce divine accordait son onction à Olivier Carré ? L’épisode serait plaisant…
L’autre espoir d’Olivier Carré pour drainer les électeurs de la droite dure tendance Wauquiez est que le Rassemblement national ne puisse constituer une liste de 55 noms. Selon Ludovic Marchetti son secrétaire départemental, RN a toutes les peines du monde à trouver les 55 noms sur Orléans. Le parti de Marine Le Pen parti en vrille à Orléans durant la mandature, aurait une tête de liste qu’on ne connaîtra… qu’après les Européennes. C’est ce qui avait opportunément permis la victoire de Serge Grouard dès le 1er tour en 2014. Complaisant il y a 6 ans avec Serge Grouard on voit mal le RN être aussi accommodant avec Olivier Carré.
La gauche atomisée !
Baptiste Chapuis (à droite), ici avec Jean-Philippe Grand.
D’où l’opposition à Olivier Carré viendra-t-elle ? De la droite peut être mais assurément de la gauche pourtant aujourd’hui en position d’extrême faiblesse du fait de son atomisation. Olivier Carré craint davantage Jean-Philippe Grand, l’écologiste, que les autres prétendants. Avec ses positions ouvertes et moins sectaires que celles d’EELV, Jean-Philippe Grand qui continue de construire son projet avec une équipe venue de tous les horizons peut rassembler large pour peu que la bataille d’égo se résolve par une ambition unitaire. Philippe Rabier de CitLab, Baptiste Chapuis du PS non
Tahar Ben Chaabane.
épaulé au niveau local par Place Publique, pourraient faire un pas vers l’écologiste aux prix de quelques arrangements politiciens. Quant à Tahar Ben Chaabanne, il continue aussi de construire un projet “dans son couloir”. Incertitude également à la gauche de la gauche où les frères ennemis de La France Insoumise et du Parti communiste pourraient s’affronter. Le charismatique et populaire Michel Ricoud élu depuis les années 80, mais en butte à des problèmes de santé, repartira-t-il au combat ou passera-t-il le flambeau à la féministe Dominique Tripet ?
Il faudra aussi compter sur l’entremetteur Jean-Pierre Sueur : certes le sénateur socialiste a asséné qu’il n’irait pas à la bataille municipale. Mais il serait illusoire de penser que l’ancien maire restera cantonné au silence sans intervenir en coulisses : il possède d’ailleurs même un programme presque ficelé (création d’un CHU, aménagement des mails, développement universitaire et culturel, passerelle, etc.). Peu convaincu par le prétendant socialiste Baptiste Chapuis on murmure qu’il pourrait pousser une candidate extérieure, comme celle de l’ancienne maire de Fay-aux-Loges, Anne Besnier.
Info, intox ? Tout va se propager à grande vitesse d’ici la rentrée d’automne quand le brouillard municipal commencera à se dissiper.
Jean-Jacques Talpin
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