“ L’homosexualité est, comme la mort, l’unique domaine exclusif de Dieu, celui sur lequel ni l’homme, ni la psychanalyse, ni la raison ne peuvent intervenir. L’impossibilité de la procréation rapproche beaucoup l’homosexualité de la mort….Il manque à l’amour entre semblables cette dimension mythique et universelle qui n’appartient qu’aux sexes opposés: plus encore que son amant, l’homosexuel aime l’homosexualité….Je l’ai déjà dit,c’est la raison pour laquelle je ne peux considérer Roland Barthes comme un grand écrivain:quelque chose l’a toujours limité, comme si lui avait manqué l’expérience la plus antique de la vie, la connaissance sexuelle de la femme”.
Condamné à ne pas être rejoint
Dans un livre posthume d’entretiens avec la journaliste italienne, Leopoldine Pallotta Della Torre qui vient de paraître , l’auteur de “L’Amant”, prix Goncourt 1984, décédée en 1996, ne laisse aucune ambiguïté sur ce qu’elle pense de l’homosexualité.
Celle qui a connu et aimé beaucoup d’homosexuels tient des propos définitifs sur eux. ” l’homosexuel est seul condamné à ne pas être rejoint”, dit-elle. La génétique et la procréation assistée qui se sont beaucoup développées depuis la disparition de Marguerite Duras auraient-elles infléchi son propos?
Dans ce petit livre où à 75 ans, elle s’introspecte sans retenue, elle évoque aussi le moteur de sa vie, la passion, revient sur son parcours, se penche sur la littérature de XXème siècle, des lieux qui l’ont portée en écriture, des gens qui ont partagé sa vie. Cela se lit sans effort , les paragraphes peuvent être abordés dans le désordre et donnent à penser. Un petit livre dont on peut se servir comme un bréviaire.
F.C.
“La passion suspendue”
Marguerite Duras. Entretiens
(Le Seuil), 190 pages, 17 euros