Romorantin-Lanthenay : Jeanny Lorgeoux – Louis de Redon, le match retour en mars 2020 ?

À 16 mois des élections municipales, la capitale de la Sologne bruisse déjà du duel attendu entre le lion à la crinière argentée, l’ex-sénateur socialiste Jeanny Lorgeoux et son challenger du MoDem Louis de Redon. Proches tous deux de la majorité présidentielle, ils se préparent à un duel serré qui sera sans doute arbitré par la gauche et les Républicains. Tour d’horizon des forces en présence.

Jeanny Lorgeoux.

323 voix. C’est l’écart de voix qui séparaient les deux têtes de liste en mars 2014. Autant dire pas grand-chose, l’épaisseur d’une plume de perdrix de la forêt de Bruadan ! Déjà dans les starting-blocks, Jeanny Lorgeoux a flairé la traque de son opposant que l’on dit proche de Jacqueline Gourault et des cercles ministériels.

« Je souhaite parachever l’œuvre entreprise il y a 33 ans. Grâce à notre travail, la cité de François Ier est passée du statut d’un bourg de province à une petite ville moderne et dynamique », annonce d’emblée le maire. Et d’ajouter, « nous avons su dépasser le traumatisme causé par la fermeture de Matra et la perte de 2000 emplois mais aussi nous relever des inondations. Selon les études de l’Observatoire, nous sommes aujourd’hui l’une des zones d’emploi les plus dynamiques de la région en termes de création d’emplois ».

L’ancien sénateur a d’ailleurs commencé sa campagne… de communication, en éditant un magazine relatant de manière exhaustive toutes ses réalisations au service de Romorantin. Réhabilitation de la friche Matra en éco-quartier, zones d’activité, logements sociaux… la liste est longue comme un jour d’été et figure sur le papier glacé de Fiers de Romo le magazine municipal.

« En 2019, nous dessinerons l’avenir en faisant de Romorantin une ville moderne dans un grand jardin remodelant le Bourgeau, redynamisant le centre-ville, ses ruelles et son commerce de proximité, développant travail et emploi au sud de la ville en direction de l’autoroute », peut-on y lire en référence aux moyens qui seront mobilisés par la ville grâce à sa participation aux programmes gouvernementaux Action Cœur de ville et Territoire d’industries (1).

Cacher ces étiquettes que nous ne saurions voir

Louis de Redon prépare un doctorat en environnement à l’université Pace située dans l’État de New-York.

L’emploi, c’est justement l’un des arguments avancés par Louis de Redon dans cette pré-campagne. Car si la vitalité de l’entreprise Caillau (650 emplois, 88 millions d’€ de chiffre d’affaires), relogée dans une usine flambant neuve avec l’aide de la communauté de communes du Romorantinais et du Monestois ou de quelques pépites comme SPS, la ville souffre encore d’un taux de chômage plus élevé que Blois et Vendôme.

« Romo regarde son passé industriel. Il faut sortir la ville de sa léthargie et tracer un nouveau cap en travaillant sur la construction d’une agglomération pour assurer les charges de centralité et créer des projets fédérateurs. Jacqueline Gourault a su impulser cette dynamique en son temps dans le blésois » insiste le leader de l’opposition. Et de rêver de grands équipements, d’une politique de mobilités ambitieuses au cœur de « cette France périphérique » qui souffre mais aussi d’actions fortes en matière de tourisme ou de numérique.

Louis de Redon: “Je n’imposerai pas mon étiquette MoDem”

Louis de Redon et son équipe préparent leur projet qui sera présenté à la rentrée 2019

Membre du MoDem, 6e vice-président en charge de l’Environnement, de la nature, de la jeunesse et des sports au Département de Loir-et-Cher, Louis de Redon affûte dont ses armes et travaille un projet ambitieux avec ses équipes. Fer de lance de son action, l’association Ensemble pour Romo, présidée par Vincent Glémot, mobilise une soixantaine de fidèles qui travaille au sein d’ateliers qui seront restitués en septembre.

La crise des partis n’a en tout cas pas échappé à cet avocat spécialisé dans les questions environnementales : « je n’imposerai pas mon étiquette MoDem ; tous les talents sont les bienvenus“. Comme au département, Louis de Redon verrait surtout le modèle d’une gouvernance plurielle (LR, UDI, Modem) transposé dans la cité des Angoulême. « Je ne comprendrai pas qu’il y ait une autre liste ; ce serait la guerre. Toutes les composantes de l’opposition doivent s’unir » avertit L.de Redon. Avis aux amateurs !

Rejetant d’un revers de main les critiques de son jeune opposant, Jeanny Lorgeoux se prépare lui aussi à repartir avec une équipe rajeunie et renouvelée. « Tous ceux qui se reconnaissent dans mon projet sont les bienvenus. Je veux rassembler toutes les bonnes volontés » affirme le maire qui a définitivement rangé sa carte PS dans l’armoire aux souvenirs.

Une équation électorale à plusieurs inconnues

Plusieurs inconnus demeurent en tout état de cause comme la position de Didier Dhenin, le 1er adjoint socialiste du maire. Restera-t-il fidèle ou tentera-t-il sa chance ? De sensibilité écologiste, l’homme ne s’est pas encore exprimé sur le sujet. « Nous lui laissons carte blanche. Il est le mieux placé pour décider ce qui est le plus pertinent », affirme Frédéric Orain, 1er secrétaire fédéral du PS en Loir-et-Cher en souhaitant toutefois que son ami parte à l’assaut de l’hôtel de ville.

« Il connait bien la ville et a toutes les compétences pour conduire une liste. Jeanny Legroux a déjà fait six mandats. Si la loi future sur le cumul des mandats était appliquée (2), il ne pourrait plus se présenter. Repartir est une erreur », annonce F. Orain. Favorable à une liste commune avec EELV, ce dernier encourage donc Didier Guénin à sortir du bois.

Quid aussi de la position de LaRem ? À qui le parti présidentiel apportera-t-il son soutien ? Entre les deux mon cœur balance… Référente départementale d’En Marche, Ismérie Giron botte en touche : « pour le moment, nous sommes sur la grande consultation et les Européennes ensuite. Les municipales viendront en mai ». Député L.R. de la circonscription solognote et leader de l’opposition au Conseil régional, Guillaume Peltier garde également le silence et observe les prémisses de cette bataille de Sologne dont ses amis, Christina Brown en tête, seront à n’en pas douter des protagonistes voir les faiseurs de roi.

Les extrêmes en embuscade

Michel Chassier (RN).

Aux extrêmes, on compte bien aussi participer à la chasse. Ancien conseiller municipal de Romorantin (2001-2014) et figure de la gauche locale, Yvon Chéry est affirmatif : « il y aura bien une liste car l’élan n’est pas retombé depuis la Présidentielle où Jean-Luc Mélenchon a réalisé 15.45 % des voix ». Celle-ci s’appuiera sur l’association Dialogues à gauche qui réunit différentes sensibilités (communistes, Mélenchonistes, écologistes…). Organisatrice de débats et forums citoyens, l’association se cherche pourtant un leader. « On attend les Européennes. Je suis de toute façon pour un rassemblement des forces de gauche » assure Yvon Chéry qui défend la cause de la France Insoumise. Ce parti pourrait d’ailleurs à défaut d’accord, aller seul au combat avec le projet de dépasser les 10 % de voix.

Comme la gauche de la gauche, le Rassemblement national souffre lui aussi d’une absence de tête de liste qu’il lui faudra pallier. « Nous réalisons traditionnellement d’excellents scores dans la capitale de la Sologne à l’image de Marine Le Pen en 2014 en tête au 1er tour (26.39 %). Nous allons construire une liste », assure Michel Chassier secrétaire départemental de la fédération du Loir-et-Cher depuis 2009. Et d’ajouter un brin perfide, « On ne voit pas de différence sur le plan politique entre J. Lorgeoux et Louis de Redon. Romorantin a besoin d’une véritable alternative ».

Et les électeurs dans tout ça ? Certains risquent en tout cas de s’étonner de l’absence de Louis de Redon sur le terrain. « Quand on veut être maire de Romorantin-Lanthenay, on ne s’expatrie à New-York. Je n’accepte pas qu’on me donne des leçons depuis cette ville en utilisant les réseaux sociaux”, s’énerve Jeanny Lorgeoux.

Installé pour une année au pays de Picsou… et de Trump pour mener à bien un projet de recherche sur le droit du changement climatique dans le but de devenir professeur (3) fin 2019, Louis de Redon se défend : « Je ne suis pas un permanent de la politique ; je suis aussi chercheur ». Et de préciser qu’il est très régulièrement dans la capitale de la Sologne pour remplir ses obligations d’élu.

Entre choc des générations et duel des ambitions, la lutte s’annonce passionnante et pour reprendre une métaphore cynégétique, la traque aux électeurs est lancée. Déjà postés, prêts à ajuster leurs carabines, les deux protagonistes sont en place mais la ligne de tir n’est pas encore complète ; il est peu probable que la battue soit réservée à ces deux seules gâchettes.

J-L. Vezon

(1) Romorantin fait partie respectivement des 222 villes et 124 territoires retenus.
(2) À partir de son entrée en vigueur, la loi interdira de cumuler plus de trois mandats successifs comme président d’un exécutif local.
(3) Il est actuellement maître de conférence à l’université de Paris 1, enseignant à AgroParisTech.

Commentaires

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  1. Les ambitions de L. de REDON sont certaines, mais je voudrais qu’il nous explique comment il fera campagne étant aux USA, (même avec des avions réguliers et nombreux), et qu’il s’engage à habiter notre ville à temps complet s’il est élu ? ce n’est pas ce qui se dit. Son étiquette MODEM n’est pas non plus très “porteuse”. Rappelons aussi qu”il soutenait MACRON…… plus très populaire.

    • Mr De Rodon serait il mégalo a s’afficher devant l’établissement d’enseignement à New York pour préparer un doctorat pour devenir Maire dans une simple ville paumé de moin de 20000 habitants !? A quoi bon cette mise en scène…

      • Cher Thomas,

        Je vous rassure : je ne suis pas (encore) mégalo. La demande de la photo venait du journaliste qui souhaitait illustrer mon engagement professionnel. Je n’ai pas encore la chance, ou le malheur, d’être un élu qui vit de ses fonctions : le mandat de conseiller d’opposition est bénévole. Je continue donc à travailler.

        Et si les Romorantinais me font confiance en 2020, je continuerai à travailler pour deux raisons : 1) j’aime mon métier de chercheur, et 2) c’est important de garder un pied dans le monde réel du travail quand on est élu.

        Concernant Romo : je suis désolé de m’engager pour la ville à côté de laquelle j’ai grandi, où je me suis installé pour me rapprocher de ma famille, et pour laquelle j’aimerais avoir la capacité de porter un projet autour d’une équipe composée de personnes formidables.

        Et Romo n’est pas paumé 😉

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