Emmanuel Macron a lui-même –selon le Journal du Dimanche du 10 décembre- parfaitement résumé les choses : « la jonction des réseaux sociaux et des télés en continu est un poison pour la démocratie ». Sur ce thème, France info ce lundi donne la parole à un politologue qui analyse parfaitement le phénomène nouveau auquel se heurte notre démocratie. Il titre son article: “peut-on encore gouverner à l’heure des réseaux sociaux?”.
Rond point de la Patte d’oie à Blois, samedi. (c) JL Vezon.
« Les autorités de l’Etat et les élus (et pas seulement ceux de la majorité, ne nous leurrons pas) font face à une défiance d’une ampleur inédite, à laquelle il est bien difficile de trouver une réponse, tant les revendications sont à la fois hétérogènes et individualistes (une par sous-catégorie de la population), irréalistes et contradictoires (davantage de services publics, mais moins d’impôts ; plus de croissance, mais moins de concurrence ; plus de sécurité, mais moins de règles), et déconnectées d’enjeux aussi fondamentaux que le réchauffement climatique ou l’endettement du pays. »
L’article complet sur https://www.francetvinfo.fr/economie/transports/gilets-jaunes/point-de-vue-gilets-jaunes-peut-on-encore-gouverner-a-lheure-des-reseaux-sociaux_3092425.html”
Les réseaux sociaux et Facebook en particulier débordent de « fakes news » qui font monter les peurs et alimentent les révoltes sur les ronds-points, relayés ensuite par l’extrême-droite. La manipulation la plus « en vogue » concerne la réunion de Marrakech qui signerait l’invasion de l’Europe par des centaines de milliers d’immigrés. D’autres rumeurs infondées évoquent cet avion qui attendrait Emmanuel Macron à Villacoublay pour l’exfiltrer à l’étranger. Sans doute vers Baden Baden! « On nous cache tout, on nous dit rien » chantait Jacques Dutronc, c’est ce même refrain simpliste et complotiste qui accuse les médias « mainstream » (officiels) de dissimuler certaines informations. Ainsi en région Centre on a pu lire que Marc Fesneau (ministre des Relations avec le Parlement) serait le gendre de Jacqueline Gourault !
Fakes news: Fesneau gendre de Gourault!
Jaqueline Gourault et Marc Fesneau.@Ch.B
C’est le bruit qui court avec persistance sur les réseaux sociaux. Puisqu’ils sont tous les deux ministres et du Loir-et-Cher pourquoi ne seraient-ils pas unis par les liens du mariage ? Oui, on se le demande ? Etant donné la différence d’âge, les justes-pensants des réseaux sociaux ont établi sans vérification aucune et aussitôt écrit que Marc Fesneau était le gendre de Jacqueline Gourault. Aller jusqu’à envisager que le jeune ministre des Relations avec le Parlement était l’époux de la plus âgée ministre des collectivités territoriales, ils n’ont pas osé, il faut dire que la case est déjà prise en haut lieu…La fake new du printemps a fait son chemin jusque y compris chez les journalistes que certains continuent à colporter à la fin de l’automne. Ici, comme dans de nombreux médias, nous avions écrit que « Marc Fesneau est le fils spirituel de Jacqueline Gourault », de là à en faire son gendre, les réseaux sociaux n’avaient qu’un pas familial à faire…Ils l’ont fait.
On pourrait en rire si au bout du compte ces fadaises, ces manipulations ne concourraient à l’insurrection en cours de Gilets jaunes prêt à gober n’importe quoi au nom de leur révolte sociale.
L’affaire des insultes proférées à l’encontre de la Jeanne d’Arc 2018 sur des sites d’extrême-droite, relayée par les réseaux sociaux, avait « révélé » qu’elle avait été élue grâce à Béatrice Ondulami, adjointe au maire d’Orléans et comme la jeune fille, originaire du Bénin… avec la « conspiration d’une négresse inféodée aux juifs », et avec à l’appui, une photo volée à Magcentre (qui a porté plainte).
Alors comment faire pour réguler ces réseaux, terrains de jeu parfaits pour manipuler l’opinion ? Trop de liberté tue la liberté, et tant que ces réseaux ne seront pas « surveillés, contrôlés », comme le sont la télévision et la radio avec le CSA et la presse avec sa loi de 1881, les réseaux sociaux continueront de faire le lit du populisme.
Changement d’algorithme
Olivier Costa (CNRS).
De surcroît, depuis janvier Facebook a changé son algorithme, quelques lignes de code qui permettent de ne plus mettre en avant en priorité les actualités des médias mais les utilisateurs et leurs proches environnement. Un changement qui a alimenté sans conteste le mouvement des gilets jaunes.
Olivier Costa sur France info, conclut ainsi son analyse : « Observons les populistes de tout poil partout dans le monde : leur impuissance est toujours imputée aux technocrates qui les empêchent de mettre en œuvre leur programme, aux journalistes qui déforment la réalité, ou à des groupes précis de la population qui nuisent aux intérêts du peuple (Mexicains, Polonais, réfugiés ou banquiers, peu importe).
Il faut garder à l’esprit qu’un nombre croissant de citoyens, en France comme ailleurs, pensent qu’il existe des systèmes politiques préférables à la démocratie (on ne dit jamais lesquels) et sont fascinés par les leaders autoritaires ou populistes. Les responsables qui persistent à attiser le conflit ont tort d’estimer que la démocratie est un acquis définitif et qu’ils seront capables de ramasser la mise électorale au terme de la crise. Les premiers sondages montrent qu’ils n’en tirent aucun profit. Ils ne font que le jeu des groupuscules antirépublicains qui ont compris très tôt le parti qu’ils pouvaient tirer de ce mouvement social. »
La rédaction
La “préfecture va couper les ponts” à Blois!
La RD 174, “quatre voies” au bout du Pont Charles-de-Gaulle à Blois.
Autre bon exemple de fake news en Loir-et-Cher, fin mai 2016, le Loir-et-Cher comme d’autres départements de la région subit de fortes pluies, les 31 mai et 1er juin. Celles-ci font gonfler les petits ruisseaux solognots, puis les petites rivières mais n’affectent que peu la Loire, qui en a vu d’autres. Cependant, les crus de ces « petites rivières » (Sauldre, Cosson, Beuvron, etc.) sont suffisamment significatives pour couper la circulation de nombreuses routes départementales. Par précaution, la préfecture de Loir-et-Cher communique, dans l’après-midi du 31 mai, auprès des entreprises situées principalement dans le nord-ouest de Blois, conseillant aux salariés de repartir chez eux – majoritairement vers le sud – dès que possible, une légère inondation de la RD 174, que les Blésois nomment « la quatre voies », étant possible en sortie du pont Charles-de-Gaulle en direction de la zone commerciale de Vineuil – Saint-Gervais-la-Forêt.
Or sur les réseaux sociaux, la nouvelle est interprétée comme : « la préfecture va couper les ponts sur la Loire, il faut partir au plus vite » et se répand comme une trainée de poudre, jetant sur les routes des milliers de véhicules dès le milieu de l’après-midi occasionnant un des embouteillages les plus monstrueux qu’a connu l’agglomération blésoise. La préfecture avait beau multiplier les tweet et post Facebook sur ses comptes officiels, rien n’y a fait, et de très nombreux automobilistes ont mis des heures à rentrer chez eux, non pas à cause de routes coupées, mais bien des embouteillages.