Amanda

Film de Mikhaël Hers, avec Vincent Lacoste, Isaure Multrier, Stacy Martin. (1h47). 

Vincent Lacoste Isaure Multrier (c) Nord-Ouest Films

On se doutait bien que Vincent Lacoste finirait par nous émouvoir au cinéma, du moins s’il interprétait d’autres rôles que ceux d’éternels adolescents ou post-adolescents tels qu’il a pu nous en gratifier – avec succès, reconnaissons-le – depuis 10 ans. Mais on ne savait pas que cela arriverait si vite. À 25 ans, l’acteur des Beaux gosses, d’Hippocrate, d’Aimer, plaire et courir vite, de Première année, joue la corde sensible dans le rôle de David, qui se retrouve à 24 ans et bien malgré lui responsable d’Amanda (Isaure Multrier, époustouflante) sa jeune nièce de 7 ans qui vient de perdre sa mère, Sandrine (Ophélia Kolb) victime d’un attentat dans un parc parisien lors d’un pique-nique sur l’herbe d’une belle soirée de printemps.

Faire son deuil et devenir père, à 24 ans, dans la même journée

Tout commence dans un Paris charmant, tel que la maire de Paris doit en rêver : un printemps abondant, une tempête de ciel bleu, un garçon qui traverse la capitale à vélo, une jeune femme et sa petite fille dans un appartement parisien, des escaliers menant vers un studio avec fenêtre sur cour. David (Vincent Lacoste, donc), la petite vingtaine, fait ce que beaucoup de jeunes de sa génération font : il enchaine les petits boulots et une formation d’élagueur d’arbres qu’on devine bidon. Il est également « agent immobilier » de touristes étrangers pour le compte d’un propriétaire qu’on ne voit pas mais dont on devine qu’il utilise pour louer ses biens une très connue plateforme web de particuliers à particuliers. À force de courir partout, il arrive en retard à la sortie de l’école où il doit récupérer sa nièce Amanda, puis se fait engueuler par sa sœur, prof d’anglais, en rentrant à l’appartement. Bref, un début de film à la facture classique mais dont on sent bien que la belle harmonie ne va pas durer.

Vincent Lacoste Ophelia Kolb (c) Nord-Ouest Films

Le ciel s’assombrit lorsque Sandrine se rend à un pique-nique dans un parc près de la porte de Vincennes. David doit la rejoindre, mais bien sûr il sera en retard à cause de touristes eux-mêmes en retard. C’est ce qui le sauvera, lui, d’une mort quasi certaine, mais pas sa sœur, victime des balles de tueurs d’un attentat perpétré sur des gens normaux qui s’apprêtaient à passer un agréable moment ensemble, c’est tout. Là, la sidération du visage mi-enfantin mi-adulte de Vincent Lacoste fige le spectateur dans une scène qu’il croit reconnaître, et pour cause : le film sort trois ans après les attentats du 13 novembre 2015. Le réalisateur Mikhaël Hers (Memory lane, Ce sentiment de l’été) a le bon goût d’user d’ellipses : c’est à la sortie de l’hôpital qu’on retrouve David hagard, tétanisé, qui rentre à l’appartement de sa sœur désormais défunte retrouver Amanda, qui dort du sommeil des innocents. Elle ne tardera pas à se réveiller en interrogeant de ses grands yeux bleus : « elle est où, maman ? ». La suite, c’est David et Amanda qui vont la construire ensemble, à partir du moment où il accepte de faire les démarches pour qu’il devienne son tuteur légal, Amanda n’ayant pas de père connu dans les parages, un grand père décédé et une grand-mère quelque part à Londres mais qui n’a jamais donné de nouvelles à ses propres enfants. À 24 ans, David doit à la fois faire son deuil et assumer un rôle de père pour lequel il n’est absolument pas préparé, la petite main très demandeuse d’Amanda dans la sienne.

Vincent Lacoste Isaure Multrier (c) Nord-Ouest Films

Autant le dire franchement : Vincent Lacoste n’est pas seulement émouvant, il est déchirant, assumant le rôle et les différentes palettes d’émotions que Mikhaël Hers lui donne à jouer, ce qu’il fait avec un talent qu’on devinait mais dont on ignorait quand il servirait à une autre cause que celle de « l’adulescence ». Il amorce un virage qui aurait pu venir plus tard, ou pas du tout, mais on sait gré à Mikhaël Hers de lui avoir proposé le scénario, et la jeune Isaure Multrier pour lui donner la réplique. Lui donner la réplique… et partager leurs émotions qui sourdent soudainement n’importe où, n’importe quand, dans ce Paris sans la fête des lendemains d’attentats tels que les vivent les rescapés. Ce qu’ils sont, lui et Amanda

F.Sabourin

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