C’est une initiative qui aurait pu surprendre l’association des Amis des Musées d’Orléans, fidèles et généreux mécènes depuis des lustres des acquisitions des musées d’Orléans, mais Olivia Voisin, la dynamique directrice des musées, a voulu élargir le recrutement du mécénat orléanais en proposant un financement participatif (un crowdfunding pour faire tendance) sur la plateforme Commeon pour compléter le financement d’une acquisition d’importance, en l’occurrence, un ensemble de 90 dessins récemment retrouvés de l’artiste orléanais oublié, Jean-Marie Delaperche (voir encadré).
Si certains “amis” ont été surpris du principe des contreparties que prévoit ce genre d’appel aux dons, de menus cadeaux qui vont du badge à une visite privée des réserves du musée (passionnante), l’opportunité de sensibiliser le plus grand nombre au soutien du musée a rapidement convaincu les responsables de l’association du bien fondé de cette souscription publique.
Quand un génie sort de l’ombre…
Né à Orléans en 1771, Jean-Marie Laperche (ou Delaperche) s’initie à l’art auprès de ses parents. Sa mère est pastelliste et son père, bonnetier, commercialise des produits pour les artistes. Orléans est alors une ville culturelle florissante sous l’impulsion du collectionneur Aignan-Thomas Desfriches et du peintre Jean Bardin. Il part à Paris suivre l’enseignement du peintre néoclassique Jacques-Louis David avant de continuer sa carrière en Russie.
Un Orléanais au destin tragique…
Alors que son frère Constant devient précepteur des enfants de Rohan-Chabot à La Roche Guyon, Jean-Marie s’installe durablement en Russie où il fonde une famille. L’aîné de ses quatre enfants, Stanislas, naît en 1796. Lorsque l’armée napoléonienne entre dans Moscou en 1812, en pleine campagne de Russie, le général de Rohan-Chabot (dont les enfants ont Constant Laperche comme précepteur) lui apporte son aide et enrôle ses deux fils aînés comme traducteurs (l’aîné parle russe, polonais et français).
Il ne les reverra jamais : quelques mois plus tard, tous deux sont retrouvés morts de froid sur le bord d’une route. Les frères Laperche retirent de ce triste destin une particule (ils s’appellent désormais Delaperche) et une rente versée par la famille de Rohan-Chabot auxquels ils restent liés jusqu’à leur mort en 1843.
Jean-Marie Delaperche se plonge durant les trois ans qui suivent dans une production fiévreuse dont témoignent les 90 dessins récemment réapparus. Il s’agit du plus grand ensemble connu de cet artiste de génie au destin dramatique.[…]
Résurrection d’un artiste orléanais…
Le nom de Jean-Marie Delaperche était connu jusqu’ici par les érudits orléanais, grâce aux sources historiques (comme les mémoires de Chabot et celles de son fils le cardinal de Rohan) et grâce à un somptueux dessin acquis par le musée de l’Ermitage à Saint Pétersbourg en 1941.
Cet ensemble de 90 dessins remet au jour l’œuvre habitée de ce dessinateur orléanais qui s’impose comme une des grandes mains de son temps, évoquant ses plus illustres compagnons de l’atelier de David, comme Anne-Louis de Girodet-Trioson, autre grand artiste du Loiret . Son style est toutefois très imprégné d’influences anglaises, inconnues en France, qui le rendent absolument unique dans le panorama des artistes préromantiques.
Ensemble, mobilisons-nous pour rassembler les fonds nécessaires à cette acquisition unique !
Le musée des Beaux-Arts d’Orléans fait aujourd’hui appel à votre générosité pour compléter le financement de l’acquisition de ce fonds de 90 dessins.
Estimé à 100 000€, 85% du financement est assuré par le Fonds du patrimoine et par la Ville d’Orléans. Les 15 000€ de cette campagne de financement participatif viendront ainsi compléter le budget nécessaire à cette acquisition !
Une exposition sera organisée après l’acquisition de ces dessins pour faire connaître cet artiste génial au destin tragique, injustement oublié de l’histoire.
Pour souscrire: https://www.commeon.com/fr/projet/delaperche
avant le 12 décembre !
Et puis cette initiative n’est finalement pas si innovante si l’on se rappelle les souscriptions populaires qui se pratiquaient aux XIXe et XXe siècles qui financèrent entre autre élan patriotique, la statue de Jeanne d’Arc de la place du Martroi ou les vitraux consacrés à la même Jeanne pour la cathédrale d’Orléans, souscription qui recueillit en 1878 la somme impressionnante de 100.000 francs de l’époque, pour un concours dont on a pu découvrir l’un des lauréats malheureux lors d’une récente exposition au musée consacrée à l’artiste Albert Maignan.
Alors, même si Olivia Voisin n’a pas l’autorité morale de Mgr Dupanloup, évêque qui fit décrocher les Baigneuses du peintre Antigna des cimaises du musée dès son arrivée à Orléans, souhaitons que son initiative rencontre un plein succès auprès des Orléanais, motivés par un nouvel engouement pour leur musée des beaux arts.
GP
Musée des Beaux Arts Place Sainte Croix Orléans
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