“Monsieur le Président, je vous fais une lettre, que vous lirez peut-être, si vous avez le temps…” chantait Boris Vian dans Le Déserteur. Pas de désertion pour le maire de Blois Marc Gricourt, qui s’adresse directement à Emmanuel Macron, au lendemain de son investiture à l’Élysée, dans une lettre datée du 15 mai. “C’est à ce titre, maire d’une ville préfecture moyenne, que je m’adresse solennellement à vous aujourd’hui”.
En trois pages bien serrées, l’ex soutien de Benoît Hamon lors de l’élection présidentielle, qui a cependant apporté tout son soutien à Emmanuel Macron dans l’entre-deux tours, fait le point sur les “politiques publiques locales qui jouent un rôle majeur dans ce qui contribue à faire société”. Ce que Marc Gricourt redoute, c’est la “limitation à 12 élèves par classe de CP et CE1 les effectifs dans les zones prioritaires. Comment comptez-vous accompagner les collectivités dont le dédoublement des classes amènera à manquer de locaux pour accueillir les élèves ? La charge de construction d’écoles nouvelles pèsera-t-elle sur les collectivités locales ?”. À Blois, il précise qu’il s’agirait de “19 classes nouvelles, où seulement 3 classes sont encore disponibles soit 16 classes” à construire.
Mais l’école n’est pas le seul point où le maire de Blois, en franc-tireur et sans le collectif de l’AMF (Association des maires de France), rappelle le nouveau Président à ses “promesses” de campagne : il y a la fameuse exonération de la taxe d’habitation pour 80 % des ménages. S’il “partage” l’analyse “sur l’injustice de cet impôt qui résulte surtout d’une inadéquation des bases de calcul anciennes (…)”, il souhaite connaître “la compensation à l’euro près” dès la première année de mise en œuvre de cette exonération, par ailleurs favorable à l’augmentation du pouvoir d’achat des personnes concernées.
Il rappelle encore que Blois, malgré la baisse de la DGF (Dotation globale de fonctionnement) de l’État, a su “contenir ses dépenses nettes de fonctionnement, les diminuant sur la période 2013-2016” (au prix d’une baisse des investissements). “Nos moyens se réduisent, nos efforts de gestion, notamment dans le bloc communal sont visibles et parfois douloureux”, et, reprenant un gimmick du Président Macron, “dans le même temps” il rappelle que c’est aux collectivités locales – et notamment les communes – qu’on demande de “contribuer à l’investissement et donc au dynamisme de nos entreprises (…)”. Marc Gricourt craint, “si les orientations présentées jusqu’ici se poursuivent, la seule façon sera de réduire voire de supprimer des politiques publiques entières”, comme le soutien aux associations ou “l’arrêt de l’entretien de nos villes”.
Le Président Emmanuel Macron – qui a nommé ce jour un Premier ministre Édouard Philippe (L.R.) – avant de s’envoler pour Berlin où il devait rencontrer la Chancelière Angela Merkel pour son premier déplacement officiel, aura peut-être emporté dans sa serviette élyséenne la lettre avertissement de Marc Gricourt, maire de Blois… Ou peut-être confiera-t-il le soin à l’un de ses futurs ministres d’un gouvernement qu’Édouard Philippe va s’employer à composer dans les heures qui viennent, de lui répondre.
F.Sabourin.
En même temps, le maire de Blois, Harmoniste historique, marque à la culotte Emmanuel Macron, et commence à préparer son prochain virage pragmatique. Il a vu son poulain préféré laminé dans sa commune. Il prend date et répartit les œufs.