Jamais dans la cour du Louvre entre la pyramide et le Carrousel, le peuple de France n’avait acclamé l’élection de son Président de la République. Cette terre était jusque-là celle des rois, du pouvoir du temps jadis. Elle est devenue aussi celle d’ Emmanuel Macron, huitième Président de la République française, le plus jeune aussi – 39 ans – dont elle se soit dotée. Il veut, dit-il, ouvrir une nouvelle ère, et renouer avec « la grandeur de la France », celle qu’elle a acquise au cours des siècles.
Une page se tourne
Son premier bain de foule c’était il y a un an à Orléans.
Moins d’une heure après l’officialisation de sa victoire, depuis son QG de campagne le nouveau Président a rappelé ce qu’était sa feuille de route : « Je ne méconnais ni les difficultés économiques, ni les fractures sociales, ni les impasses démocratiques, ni l’affaiblissement moral du pays. Je sais la colère, l’anxiété, les doutes qu’une grande partie d’entre vous a exprimés. Il est de ma responsabilité de les entendre… Je défendrai la France, je défendrai l’Europe sur son sol comme sur le plan international. Une nouvelle page s’ouvre ce soir. Je ne me laisserai pas arrêter ». Des mots prononcés, sans un sourire avec une gravité toute présidentielle qui laissa interloquée quelques instants la foule venue pour fêter l’homme pour lequel elle avait voté, celui qu’elle a porté au pouvoir, auquel elle a confié son avenir.
Ils étaient plus de 10.000
Ils étaient plus de 10.000 accourus comme le soir tombait, se soumettant aux fouilles strictes sans rechigner, les trouvant utiles, comprenant qu’un lieu fermé, facilement contrôlable ait été choisi . A leur arrivée des drapeaux tricolores leur étaient distribués et ils les agitaient avec plaisir. Beaucoup avaient enfilé des tee-shirts également offerts, roses, jaunes, bleus, portant la mention « Emmanuel Macron, Président. ». Franck, 38 ans, originaire de Centre Afrique , en arborait un au dessus du drapeau de son pays d’origine : « Je suis ici ce soir pour remercier les Français de ne pas avoir accepté la fermeture souhaitée par le FN ». Même enthousiasme chez Icham, 28 ans, habitant de Seine-Saint-Denis, « Macron, ses paroles, ce qu’il dit m’ont redonné espoir. Il casse le pessimisme ». Margot, étudiante en droit , 21 ans , est venue avec deux copains étudiants comme elle, « j’ai adhéré petit à petit à Emmanuel Macron. J’ai étudié ce qu’il propose et je l’ai adopté ». Don, 23 ans est franco-Américain, né d’une mère américaine et d’un père français. « Je fais mes études supérieures en France. Après l’élection de Trump aux USA, il fallait qu’il se passe quelque chose en France. Macron l’a fait. Je suis heureux ». Françoise et Patrick, un couple de ce qu’on a coutume de désigner comme des Français moyens, dans la cinquantaine ont été « séduits par ce jeune de talent qui sait embrasser la complexité du monde ». Beaucoup de jeunes, mais aussi des familles et des gens d’âge mûr, seuls ou en couple.
Hors les murs, derrière les contrôles et les barrières, rue de Rivoli entre les nombreux cars de CRS, des badauds applaudissent, des voitures klaxonnent. La nuit tombe et sur l’estrade adossée à la Pyramide illuminée des DJ chauffent l’assistance qui danse mais attend son héros.
Enfin le Président !
Dans la nuit, le Président arrive, seul, à pas lents, l’homme qui assume le pouvoir, qui l’incarne, tandis que retentit l’Hymne à la joie.
Un symbole que n’aurait pas renié François Mitterrand. Le provincial monté à Paris, inconnu il y peu encore, harangue avec passion un auditoire qui lui est acquis mais qu’il enthousiasme avec une empathie qui lui est naturelle, un rassembleur qui remercie ceux qui ont voté pour lui, même par devoir, et dit qu’il a entendu ceux qui ne partagent ses points de vue. Il parle d’avenir, il apporte de l’espoir.
Puis il est rejoint par son épouse Brigitte, par les enfants et les petits enfants de celle-ci qu’il a adopté dans son cœur. Pas de personnalité politique sur l’estrade, juste une famille quand retentit la Marseillaise entonnée par plus de 10.000 voix. Un instant de communion républicaine.
Françoise Cariès