Blois : Pierre Morabia et le piano de Prokofiev

Le 9 février à l’Auditorium du Conservatoire de Blois, Pierre Morabia a donné un concert complètement inédit consacré  à de la musique de piano de Serge Prokofiev. L’artiste trouve nécessaire de rappeler quelques grandes étapes et périodes créatrices du compositeur, et il a raison.

Né en 1891 près de Moscou, le jeune surdoué reçoit ses premières leçons de sa mère pianiste et compose à cinq ans quelques mesures d’un Galop indien pour le Piano. En 1901, au Conservatoire de Saint-Petersbourg, il bénéficie de l’enseignement de maîtres tels que Glière, Liadov, Rimski-Korsakov, Tcherepnine. Il s’intéresse à Debussy, Strauss, Reger, Schönberg, donne ses premiers récitals, fait publier ses premières partitions vers l’âge de vingt ans. Il porte encore l’influence de Schumann, Reger, Rachmaninov. Dans son 1er Concerto et sa 1ère Sonate, il affirme un style plein de carrures rythmiques, d’harmonies âpres et imprévues, un jeu où alternent la vigueur de frappe et le lyrisme élégiaque. Le second Concerto pour Piano (1913) provoque le scandale. La rencontre à Londres avec Diaghilev (1914) marque le début d’une collaboration durable. En 1916, il obtient l’autorisation d’émigrer et s’exile aux États-Unis. En 1920, il est en France. Il joue et compose beaucoup, entreprend de nombreux voyages. En 1923, il se retrouve à Paris où il se marie. En 1927, premier retour en URSS. Il mène une vie instable. En 1936, c’est la composition de Pierre et le Loup. En 1938, Roméo et Juliette, un ballet créé à Brno. Au contraire de Rachmaninov, Tcherepnine, Glazounov, il refuse d’émigrer. En 1940, Prokofiev fait la connaissance d’une jeune poétesse qui devient sa compagne. Le ballet Cendrillon est achevé vers l’année 45. Prokofiev meurt le 5 mars 1953 dans la banlieue de Moscou où il habite depuis la fin de la Guerre. Survenant le même jour que celui de Staline, le décès du compositeur passe pratiquement inaperçu.

Prokofiev a utilisé à plusieurs reprises le thème de Roméo et Juliette, qui constitue l’argument de son ballet le plus fameux, dont le compositeur a aussi tiré les trois Suites d’orchestre op. 64 bis, 64 ter et 101,  plus la Suite pour piano op. 75 constituée de dix numéros, celle-là même que Pierre Morabia a inscrite à son programme de ce soir. Beauté des thèmes, finesse de l’écriture, tous les contrastes que l’instrument peut proposer techniquement sont mis en œuvre. En particulier, Prokofiev  écrit parfois dans un langage révolutionnaire d’une grande âpreté harmonique, traitant le piano comme un instrument à percussion dans une manière qui n’est pas sans rappeler Bartok, mais il est également capable d’une riche invention mélodique. Son articulation puissante est mise au service de formes anciennes telles que la toccata, la marche, la gavotte, le menuet. Pierre Morabia évolue dans ce répertoire avec la même aisance que chez Mozart ou Schubert, faisant ressortir toute la grâce du portrait de Juliette petite fille (N° 4) et la scène violente dans laquelle se confrontent les familles rivales des Montaigu et des Capulet. (N° 9)
Voila bien une soirée qui mérite amplement son qualificatif de « découverte » ! Le 9 mars, nous retrouverons notre ami revenu à un programme Schubert.

Roger Bouchard.

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