“Paterson”, le cercle du poète inconnu

Ce qui charme dès les premières images du flm de Jim Jarmush, c’est cette poésie de la mise en scène où tout est montré avec légèreté: s’ouvrant avec cette image en plongée du couple enlacé suivie par petites touches de gros plans sur les objets anodins baignant dans la lumière matinale, le film installe une subtile poésie du quotidien,  jusqu’à cette répétition des jours comme les strophes d’un poème classique.

Paterson

Paterson est une petite ville un peu décrépite du New Jersey, en face de l’état de New York,  qui a connu, comme nous le rappelle le patron du bar du coin, quelques célébrités parmi lesquels les poètes William Carlos Williams et Allen Ginsberg. Et par une sorte de condensation diégétique, notre chauffeur de bus s’appelle aussi Paterson et écrit des poèmes.

Paterson (Adam Driver, un nom prédestiné…) conduit un autobus (qui arbore sur le flanc une publicité pour un divorce à 299 $ via le téléphone portable, mais Paterson n’en n’a pas), il écoute les conversations des passagers qui forment une sorte de bruit de fond sociétal, capté par notre poète qui à la pose ouvre sa lunch box en compagnie d’une image de Dante, et écrit des poèmes inspirés de son quotidien, comme cette boite d’allumette sublimée en poème d’amour.

Paterson

Une fois sa journée terminée; Paterson retrouve son sweet home avec sa charmante femme remplie quant à elle, d’une fantaisie décoratrice (toujours en noir et blanc) ou musicale, lorsque ce n’est pas culinaire, histoire de devenir la reine du cupcake de Paterson; elle aime son chauffeur de bus et rêve de lire les poésies qu’il écrit, réfugié au sous sol de la maison. Et puis le soir, Paterson promène le chien jusqu’au bar d’à coté, le lieu du non-amour.  Et le film décrit une vie étrangement pleine de détails amusants ou curieux comme ces nombreux jumeaux de tous ages que croise Paterson, ou cette phrase stéréotypée que répète tout un chacun à propos de la panne de son bus vétuste, illustrant le formatage des cerveaux, avec plus loin, cette référence cinéphilique au film (en noir et blanc!) Island of Lost Souls (L’ile du Dr Moreau, adaptation de 1932 du roman de HG Wells) où un infâme médecin fabrique par vivisection, des êtres mi-hommes mi-bêtes capables d’agir mais pas de penser…

Le personnage lunaire de Paterson est une invitation à changer notre regard sur le monde pour retrouver cet émerveillement poétique qui transcende notre quotidien, et, découvrant ce lieu essentiel à notre poète, ce paysage des cascades de Paterson, propice à une méditation sereine mais aussi à la rencontre d’un autre poète, japonais de passage, nous pourrions reprendre le slogan:

“Poètes de tous les pays, unissez-vous !”

Gérard Poitou

“Paterson” un film de Jim Jarmush   1 h 58

avec Adam Driver, Golshifteh Farahani

 

 

 

 

Commentaires

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  1. Mais il y a également dans ce film un peu déroutant également un personnage très important : Marvin, le chien. A ne pas négliger pour sa personnalité.

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