Au terme d’une allocution télévisée de dix minutes, le Président de la République a jeté l’éponge. Il renonce à se présenter à sa succession en 2017 et clarifie ainsi la situation à gauche. C’est le première fois depuis le début de la cinquième République que le Président sortant ne brigue pas un second mandat. Selon toutes probabilités, Manuel Valls devrait démissionner dans les prochains jours, avant samedi, et Bernard Cazeneuve, le ministre de l’Intérieur devrait le remplacer à Matignon.
Dans son discours teinté d’émotion, François Hollande a laissé planer le suspens avant d’annoncer, « J’ai décidé de ne pas être candidat à l’élection présidentielle ». Pourquoi cette décision qui a surpris tout le monde? «Je suis conscient des risques que ferait courir une démarche, la mienne, qui ne rassemblerait pas autour d’elle ».
François Hollande, depuis 2012, avait essayé d’être un « président normal », il le confirme avec cette sortie digne et courageuse. Il explique que « l’exercice du pouvoir » ne lui a jamais fait perdre sa « lucidité ». En perdition dans les sondages, victime d’un Hollande basching dérapant parfois jusqu’à l’insulte – comme la derrière couverture du Point – François Hollande a pris aussi la mesure des derniers résultats des primaires. Que ce soit celle des écologistes, avec l’éviction de Cécile Duflot au premier tour ou la primaire de la droite qui a vu son prédécesseur, Nicolas Sarkozy, évincé avec perte et fracas par son ancien Premier ministre.
Surtout pas d’un duel droite-extrême droite
La droite a élu son candidat à la Présidentielle dimanche dernier. La gauche vient de perdre l’un des siens. François Hollande, lucide, a préféré l’intérêt collectif à son destin individuel. Conscient de la chienlit que générait sa candidature à la présidentielle, il a préféré renoncer. Le Président ne veut surtout pas d’un duel au second tour de mai 2017 entre la droite traditionnelle de François Fillon et la droite extrême de Marine Le Pen. S’il reste une chance à la gauche de se rassembler pour éviter cette configuration, François Hollande n’a pas voulu être l’obstacle à cette hypothèse.
Modèle social et mariage pour tous
Avant d’annoncer son choix, le Président de la République a dressé le bilan de son quinquennat. Il s’est notamment vanté d’un “modèle social conforté“, de comptes publics “assainis”, d’une Sécurité sociale “à l’équilibre” et d’une dette du pays “préservée”. Il a encore évoqué la loi sur le mariage pour tous, la signature de l’accord mondial sur le climat lors de la COP21 à Paris, et l’engagement de la France “au Mali, en Centrafrique, en Irak, en Syrie” contre le terrorisme.
Un rôle déterminant depuis l’Élysée
S’agissant du chômage son “engagement majeur” qui conditionnait sa candidature, François Hollande a déclaré : “Les résultats arrivent plus tard que je ne les avais annoncés, j’en conviens, mais ils sont là”. Puis il a confessé “un seul regret“, celui d’avoir “proposé la déchéance de nationalité”. “Je pensais qu’elle pouvait nous unir alors qu’elle nous a divisés”.
François Hollande, soulagé par sa décision, soutiendra-t-il un des candidats de la gauche à la Présidentielle? Ceux-ci se retrouveront-ils tous maintenant en compétition dans le cadre de la primaire? François Hollande devrait les y encourager. Alors que Nicolas Sarkozy a été renvoyé piteusement au vestiaire au premier tour de la primaire, François Hollande, en évitant semblable humiliation, va continuer depuis l’Élysée à jouer un rôle déterminant pour l’avenir du pays.
Ch.B
Jean-Pierre Sueur : « Une annonce surprise »
“Le renoncement de François Hollande m’a surpris comme tout le monde, même ses proches ne savaient pas. Je pensais qu’il serait candidat hors primaire car il est insensé qu’un président sortant participe à une primaire. François Hollande a considéré que sa non-candidature était la meilleure ou la moins mauvaise des solutions. Ce fut sans doute une décision difficile à prendre et très intime. J’exprime mon amitié au chef de l’État. Je suis sur que son bilan important sera réévalué par l’histoire. Beaucoup de choses ont été faites sur le plan économique comme social. Le chef de l’État a fait face au terrorisme, à des heures très lourdes avec courage et dignité. .Il a reconnu une erreur, la déchéance de nationalité que je n’aurai pas voté.
La gauche doit maintenant trouver le chemin du rassemblement. A l’heure actuelle, il y a six candidats à la présidentielle et autant à la primaire. Or , face à la droite et à l’extrême droite, la gauche a une responsabilité historique et pour cela, elle doit se rassembler.”
Propos recueillis par F.C.