L’écrivain Jean-Michel Guenassia viendra à la rencontre de ses lecteurs à 18h30 ce mardi 27 septembre à la Librairie Nouvelle d’Orléans et le mardi 4 Octobre à 19h30 à la Boîte à Livres à Tours. Il y présentera son nouveau roman « La valse des arbres et du ciel » (Albin Michel) un passionnant journal intime tenue par une femme très vieille au moment où elle l’écrit et aujourd’hui disparue.
Marguerite Gachet raconte l’année de ses dix-neuf ans. Elle rêvait alors de quitter Auvers-sur-Oise, de partir pour l’Amérique et d’y devenir peintre. A trois ans elle a perdu sa mère. Elle a été élevée ainsi que son frère Paul de trois ans son cadet par une gouvernante, Louise. Autoritaire et cupide son père , médecin, a l’intention de la marier avec le fils d’un pharmacien de Pontoise. Il n’est guère intéressé par le talent et les aspirations de sa fille. Marguerite a pourtant obtenu son baccalauréat avec les félicitations du jury. Elle voudrait s’inscrire aux Beaux-Arts mais ils sont interdits aux filles. Alors, elle s’applique à appréhender le style de Cézanne dont son père possède un tableau. Tout change quand Camille Pissaro, demande au docteur Gachet de s’occuper d’un de ses amis, un artiste sujet à des accès d’humeur, Vincent van Gogh.
Interview
Jean-Michel Guenassia : «J’ai voulu un livre monde »
Pourquoi et comment en êtes-vous venu à vous intéresser à cette partie de la vie de van Gogh et à contredire la thèse de son suicide ?
Je ne suis pas le premier à émettre l’hypothèse que Van Gogh ne s’est pas suicidé. Je me suis appuyé sur le livre des américains Steven Naifeh et Gregory White Smith et sur les ouvrages de Benoît Landais, spécialiste mondialement reconnu de l’œuvre de Vincent van Gogh . Mais Vincent, dans le livre je ne l’appelle jamais van Gogh car au moment où je me place il n’est pas encore célèbre, il est seulement Vincent, un peintre n’est que l’objet du livre. Le sujet en est Marguerite Gachet. J’ai ainsi assouvi une vieille envie de m’atteler à un personnage féminin écrit à la première personne. Jusqu’ici je n’avais parlé qu’en tant qu’homme, ce n’est pas évident d’entrer dans la peau d’une femme. C’est particulier
Mais vous n’occultez pas van Gogh, loin de là ?
Non, je l’ai montré dans la révélation de la lumière qui a épanoui son génie. Il n’est pas un homme chétif, malade et dépressif, mais au contraire un individu solide, travailleur, plein de projets. Il pressent la reconnaissance de son talent. Il n’est pas fou, juste obnubilé par son envie de peindre Comme d’autres je pense qu’il n’a pas pu se suicider même si sa mort est toujours entourée de mystère.
L’histoire d’amour entre Vincent et la fille du docteur Gachet est plausible sinon probable ?
Bien qu’on n’en possède pas de preuve formelle c’est loin d’être impossible. Vincent pense à elle avec « autant de force que moi », dit-elle « Je ne veux rien d’autre de ma vie que rester à ses côtés, l’aider, l’encourager, peindre jusqu’à ce que la mort nous sépare.. » Mais Vincent ne veut pas s’encombrer d’une histoire d’amour bourgeoise. Amants mais pas mariés. Le père découvre l’idylle et bat la fille qui 60 ans plus tard , vieille fille, raconte.
Mais ce roman n’est pas que le récit d’une histoire d’amour ?
J’ai voulu un livre monde. J’ai voulu dépeindre la réalité sociale sous la troisième république, période prospère mais où les retombées économiques sont très mal réparties. La société tient les femmes pour des êtres de deuxième zone, des moins que rien au même titre que les habitants des colonies où la France s’installe. On est anti juif, férocement anti- Allemands contre qui on a une revanche à prendre, pro russes avec qui on pourrait prendre l’Allemagne en tenaille On veut reprendre l’Alsace et la Lorraine, la République n’est pas du tout stabilisée. L’époque est très violente, , très raciste, très agitée ; J’ai voulu montrer tout cela, c’est pourquoi j’ai intercalé dans mon texte des passages des journaux de l’époque, plus particulièrement la Lanterne que Vincent lisait tous les jours.
Propos recueillis par F.C.