D’abord soyons clairs, le film n’a rien à voir avec le bouquin éponyme de Sylvain Tesson, dont on se demande quand même pour quelle raison douteuse ce dernier a donné une autorisation à cette improbable adaptation cinématographique: point n’est besoin d’une thèse de cinéma pour savoir que cet art du récit en image est ontologiquement lié au dialogue et/ou à l’action. Le récit à la première personne d’une vie d’ermite solitaire et surtout la philosophie que l’expérience de Sylvain Tesson nous propose de partager dans son livre, semble bien intranscriptible dans un film: seul Eisenstein a rêvé de porter la pensée de Karl Marx au cinéma…
Oublions donc la supercherie du titre et regardons le film pour ce qu’il est, la description d’une laborieuse relation entre deux hommes isolés pour des motifs totalement différents mais qui semblent se comprendre malgré la langue et l’histoire, où l’initiation à la chasse devient la métaphore de l’initiation à la vie, mièvre parabole sur l’humanité que les magnifiques paysages sibériens finissent par rendre bien dérisoire.
Personnellement, j’ai toujours eu un faible pour l’exotisme au cinéma et j’adore ces voyages obscurs qui nous font visiter tant de lieux où nous n’irons jamais. Mais la magie ne fonctionne que si elle garde une authenticité fondée autant sur le récit cinématographique que sur les paysages filmés, malheureusement, quand le film se contente de transposer une robinsonnade de bobo parisien* dans un décor “toile de fond”, on a soudain la détestable impression de chausser les pataugas du touriste.
Reste la curieuse idée de confier la musique à Ibrahim Maalouf, qui même si elle parait bien inadaptée à la latitude des lieux, nous guérit de l’ennui distillé par ce film.
Gérard Poitou
*Qui n’est pas sans rappeler le “Comme un avion” de Bruno Podalydés
“Dans les forêts de Sibérie” un film de Safy Nebbou 1h 45
Avec Raphaël Personnaz, Evgueni Sidikhine
https://www.youtube.com/watch?v=rGHbya-J75Q