Afin de le rendre invisible dans la société, les handicapé(e)s subissent indifférence, discriminations, ostracisme, mises à l’écart et exclusions dans la ville, le monde du travail mais aussi dans leur affectivité et sexualité.
Le constat
Aujourd’hui en France,12 millions de personnes sont reconnues handicapées (https://www.ocirp.fr/actualites/les-chiffres-cles-du-handicap-en-france) et moins de la moitié d’entre elles sont actives. Les handicapés font partie des nombreux laissés-pour-compte, voire de parias qui persistent dans notre société libérale et normative. Ceux qui n’ont pas tous les outils afin de participer à la compétition économique, qui ne sont pas totalement autonomes ou qui s’éloignent de la normalité ambiante, sont ignorés, disqualifiés et évincés (https://www.inegalites.fr/Emploi-la-difficile-insertion-des-personnes-handicapees). Force est de constater que plus le handicap est sévère, plus le revenu est faible et le niveau de pauvreté élevé (https://www.inegalites.fr/Le-handicap-expose-a-la-pauvrete-et-aux-bas-niveaux-de-vie).
Un handicap s’exprime selon l’environnement
La Loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances a redéfini le handicap : « Constitue un handicap, au sens de la présente loi, toute limitation d’activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d’une altération substantielle, durable ou définitive d’une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d’un poly-handicap ou d’un trouble de santé invalidant. ». Cette loi a donc remplacé la notion traditionnelle de déficit ou de perte d’autonomie inhérents uniquement à l’individu, par la notion de personne en situation environnementale de handicap. Elle met désormais l’accent sur les conditions du milieu qui entraîne, ou non, l’extériorisation d’un déficit. Il est enfin reconnu qu’un handicap s’exprime selon l’environnement matériel, social ou humain, même s’il découle à l’origine d’une déficience. Ainsi, il existe une dualité dans le handicap : il est d’une part la conséquence d’une déficience constante ou passagère et d’autre part directement en rapport avec un environnement non adapté aux capacités d’un être.
L’autonomie des individus est une fiction
Quelqu’il soit et dans toute société, un individu prétendu autonome requiert en permanence, dans le cours de ses activités quotidiennes, de la part d’autrui, une assistance, un appui, un apport voire une protection. Durant certaines périodes de la vie (petite enfance, maladie, grand âge) cette assistance peut être vitale. Tout un chacun n’est autonome que parce qu’une certaine organisation de la structure sociale et de l’aménagement matériel du monde qui l’entoure lui permet de fonctionner ainsi. L’autonomie individuelle est une chimère. Une personne déficitaire peut se révéler talentueuse, peu handicapée dans certaines situations ou dans un environnement adapté à ses capacités. A contrario, un « normal » peut être perdu, sans repères et incompétent dans un milieu qu’il ignore.
La normalité est le regard que l’on porte sur l’autre
En dehors des règles de normalité statistique, nous avons tous une manière personnelle d’envisager ce que peut être un individu « normal », c’est à dire autonome, indépendant et qui nous ressemble. C’est un jugement empirique qui exclut arbitrairement le handicapé. Pourtant, le handicap fait bien partie de la vraie vie, de notre collectivité comme de toutes communautés. Hormis les transgressions interdites par la Loi, la normalité est un concept subjectif, fluctuant et sujet à caution. La définir comme étant à l’identique au plus grand nombre, ressembler au plus près à un archétype, n’avoir aucune « anomalie » et vivre selon nos habitudes et critères du moment, c’est être dans un déni qui ignore la dissemblance et encourage l’eugénisme (http://www.magcentre.fr/184330-leugenisme-fait-partie-integrante-de-nos-moeurs/). La normalité n’est que le regard que l’on porte sur l’autre. L’anormal surgit lorsque l’image de l’autre nous gène, nous dérange, nous choque, nous effraie.
Changer nos regards et notre environnement
Dans cette démarche de reconnaître et d’inclure le handicap comme composante naturelle et banale, donc « normale » de notre société, il convient de changer individuellement nos regards et rendre volontairement et collectivement accessible notre environnement. La secrétaire d’Etat chargée des personnes handicapées, Sophie Cluzel, maman d’un enfant trisomique, doit savoir de quoi elle parle quand elle déclara que « nous devons changer le regard de la société sur le handicap, vaincre les appréhensions et lever les obstacles. Nous devons relever le défi d’une société accessible, fraternelle et solidaire, qui facilite la vie au quotidien au lieu de segmenter et qui rend possible au lieu de contraindre »…
Une authentique démarche inclusive
Les tractations pour les prochaines élections municipales s’activent à droite comme à gauche. Que ce soit en matière de transports, de santé, de loisirs, de logement, d’emploi, d’éducation et de services, quelles sont les propositions des postulants à la gouvernance d’Orléans afin de mettre en place une authentique démarche inclusive en matière de handicap ? Sauront-ils construire une ville « accessible, fraternelle et solidaire » pour nos concitoyens handicapés ?
JP Briand