Au cœur de la conférence citoyenne régionale à Orléans

Pour cet exercice démocratique inédit, 75 personnes tirées au sort ont apporté leur expertise personnelle au Grand Débat National.

Le Grand débat version régionale au Centre de Conférence.

« C’est la première fois que je participe à un tel débat démocratique en France et j’en suis fière ! ». Cette parole d’une participante de la première conférence citoyenne régionale organisée vendredi et samedi à Orléans résume bien l’état d’esprit des 75 personnes, toutes désignées après tirage au sort. « On ne sait pas comment nos propositions seront entendues ou reprises mais on a eu le sentiment de pouvoir parler librement, d’exprimer tout ce qu’on a à dire », se félicite un autre participant. Consécutives au mouvement des Gilets jaunes, et dernières réunions conclusives du Grand Débat, ces conférences étaient censées apporter un avis et une hiérarchisation des propositions issues des débats locaux. Une occasion pour faire le tri dans la « foire aux bonnes idées » avant de les faire remonter à Paris.

Pour cela la mission gouvernementale du Grand Débat s’est appuyée sur le « must de la démocratie participative » : un jury de citoyens tirés au sort à partir de listes téléphoniques et censé présenter un panel représentatif de la société française.

Peu de jeunes !

Si l’initiative a été jugée heureuse et réussie par 73 des 75 participants de la conférence tenue à Orléans, tout avait pourtant mal commencé : personnes contactées au dernier moment, la veille ou l’avant-veille du débat avec pour certains une confirmation le matin même de la réunion. Un cafouillage qui s’explique par le nombre de refus d’y participer -9 sur 10 dit-on- et la difficulté de toucher certains publics pour constituer un panel représentatif de la société avec des impératifs de parité, d’âges, de catégories socio professionnelles, de lieux d’habitation et de tailles des communes. Objectif atteint avec une conférence de 75 personnes diverses avec cependant une présence réduite de jeunes au profit de citoyens plus murs, voire âgés.

Les garants du Grand débat dont Nadia Bellaoui (en bas à gauche) qui était à Orléans.

Passée cette difficulté de départ, la conférence a été menée à haut rythme par des professionnels du débat avec une organisation et une logistique bien huilées, efficaces et productives. Chaque participant était assigné à une table de 6 à 7 dotée d’un « animateur facilitateur » et devant travailler sur un seul thème : fiscalité, vie citoyenne, organisation de l’État ou écologie. Par-delà l’ambition démocratique l’exercice se veut scientifique avec la présence de deux chercheuses qui effectuent leur travail de doctorat sur le processus, avec la présence de Nadia Bellaoui, une des 5 référentes nationales du Grand Débat garantissant l’indépendance de cette conférence. Tout au long des deux jours de travail les participants sont mobilisés pour intervenir, participer, élaborer, établir des diagnostics et surtout proposer.

Ni RIC ni ISF !

Lors d’un grand débat local.

Pour la plupart les participants découvraient la pratique du débat démocratique puisque sur les 75 seuls 18 avaient déjà participé à un débat local. Malgré tout « chacun à découvert qu’on pouvait avoir une parole libre et avancer des idées y compris sur des sujets qu’on ne maîtrise pas », s’est réjouie une participante. Les idées ont en effet fusé de toutes parts. Certes on attendait logiquement que les propositions émises lors des débats locaux ou par les gilets jaunes sur la fiscalité, le nécessaire retour de l’ISF (impôt de solidarité sur la fortune) ou sur l’instauration du RIC (référendum d’initiative citoyenne) fassent florès et s’imposent dans ce débat. Et cela d’autant plus sur cette assemblée de 75 citoyens, 32 ont déclaré être « plutôt en sympathie » avec les thèses des Gilets Jaunes. Pourtant pas une seule fois les acronymes ISF ou RIC (certains découvraient même l’existence de ces concepts pour la première fois) n’ont été prononcés et pas une seule fois ces revendications n’ont été mises en avant. La preuve s’il en fallait que les gilets jaunes sont loin de représenter « le peuple » et d’englober toutes ses attentes !

La santé prioritaire !

Après deux jours de travaux, une quinzaine de propositions*, certaines vagues et floues d’autres plus détaillées ont été émises et seront donc dirigées vers le national. Beaucoup touchent la fiscalité : demandes de TVA différenciée, plus grande égalité et progressivité, impôt touchant tous les citoyens même les plus démunis. D’autres propositions ont revendiqué plus de décentralisation, la suppression du sénat et du Comité économique et social et leur remplacement par une nouvelle chambre plus « citoyenne », des mesures effectives pour l’écologie, une alimentation plus saine, des économies d’énergie davantage subventionnées, etc Mais la mesure jugée prioritaire par cette assemblée régionale qui l’a validée par un vote concerne la santé et les déserts médicaux. La proposition plébiscitée par 9 des 12 tables de la conférence ne demande rien de moins que d’obliger les étudiants obtenant leur diplôme de médecin à s’installer dans les territoires ou les déserts médicaux durant 3 à 5 ans. Une proposition qu’Emmanuel Macron aura bien du mal à satisfaire tant le lobby médical est omniprésent à tous les niveaux du pouvoir politique !

J.-J.T

Les 16 propositions retenues

réformer profondément le système fiscal pour plus d’équité-dépenser mieux pour vivre mieux (faire des économies et réorienter vers des dépenses sociales)-

poursuite de la décentralisation

l’impôt pour tous, l’impôt par tous (impôt + TVA)

transparence et confiance (communication + information sur le coût des services utilisés)

optimisation de l’organisation administrative par la simplification du mille feuille institutionnel (suppression de strates administratives)

percevoir mieux toutes les sommes dues à l’Etat (dette)

citoyenneté par l’impôt (progressivité de l’impôt et élargissement de l’assiette)

un médecin pour tous: service médical obligatoire (5 ans après la formation d’un médecin en fonction des déserts médicaux + quota)

échelle de qualité écologique et sanitaire de l’aliment (mieux informer le consommateur)

tous citoyens: enseignement de la citoyenneté via un parcours citoyen (parents, éducation nationale, Etat)

tous citoyens: assemblée citoyenne locale et nationale

faire de la substitution des énergies fossiles et des économies d’énergie une priorité gouvernementale

participation citoyenne: intégrer les citoyens dans toutes les instances de prise de décision

booster les travaux d’économie d’énergie par des subventions (notamment pour l’isolation) la loi par tous et pour tous (collecter des informations, comité-débat, résultat fournis aux parlementaires)

Commentaires

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  1. Je suis étonné que vous ne mettiez pas en évidence l’impossibilité pour l’organisateur de trouver 100 personnes pour participer à ce prétendu débat citoyen ! Il serait bon de pointer le nombre de réponses négatives à cette invitation et cela malgré tous les avantages proposés pour convaincre les personnes contactées ! Bien sûr vous le faites mais cela est noyé au milieu d’un très long commentaire. Il me semble pourtant que c’est un élément essentiel qui aurait dû être mis en tête de votre article pour relativiser l’intérêt de cette consultation qui nous coûte “un pognon de dingue” !

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