François Zaragoza, Catalan de l’Orléanais, renvoie dos à dos, “le psychorigide”, le chef du gouvernement espagnol, Mariano Rajoy et le “provocateur” le chef du gouvernement séparatiste de Catalogne, Carles Puigdemont. Président du Mouvement européen du Loiret, François Zaragoza est l’un de ces enfants de Républicains espagnols réfugiés en France après la guerre civile espagnole qui ont refusé de vivre sous le joug de Franco.
Né en Eure-et-Loir, implanté dans l’Orléanais à Ingré, François Zaragoza comme de nombreux fils de réfugiés a demandé et obtenu la double nationalité. C’était il y a quatorze ans.
Rattaché à la région d’Amposta sur le delta de l’Ebre, (ville jumelle de Saint-Jean-de-la-Ruelle) à l’extrême sud de la Catalogne, d’où ses parents sont originaires, François Zaragoza vote grâce à ce statut, non seulement aux élections nationales (pour les députés et les sénateurs), mais aussi aux élections régionales, donc pour le Parlement catalan. Socialiste affirmé, François Zaragoza précise d’emblée, “La Catalogne c’est l’Espagne. Or la règle fondamentale en Espagne, c’est la Constitution adoptée en 1978 qui interdit aux communautés autonomes (les régions) l’organisation de référendum en vue de l’autodétermination”. Autrement dit, ce référendum qu’il n’hésite pas à qualifier de “théâtral” (s’il n’y avait eu les blessés), d’il y a une semaine, est illégal.
Parmi toutes les maladresses et les dérapages qui ont alimenté l’escalade en Catalogne, François Zaragoza pointe le discours solennelle du roi Felipe VI: “Sa déclaration a été malheureuse car il est le roi de tous les Espagnols, y compris de ceux qui ont été blessés par la police. Or il n’a pas eu un mot pour eux”.
“Macron aurait mieux fait de se taire”
François zaragoza
Au passage, notre Catalan de gauche épingle aussi le Président français qui, selon lui, “aurait mieux fait de se taire”. Sa déclaration a été brutale et le fait d’appeler le chef d’un autre Etat par son prénom, son ami Mariano, n’était pas opportune”.
Dans l’imbroglio politique qui plonge l’Espagne dans la crise, il ne faut pas oublier les racines de ce conflit. “La Catalogne dispose d’un statut d’autonomie qui peut être révisé et l’a été il y a une dizaine d’années par une majorité catalane de centre gauche. Cette révision avait été acceptée par la gouvernement de gauche à Madrid, le gouvernement de Zapatero.”. Un nouveau pas à l’époque vers une autonomie encore plus large de la Catalogne puisque ce nouveau statut parlait de “nation catalane”. A l’époque, M. Mariano Rajoy, et ses amis de droite ont attaqué ce nouveau statut devant le Tribunal constitutionnel qui a estimé ce nouveau statut inconstitutionnel. “Entre temps la droite a pris le pouvoir en Espagne à Madrid et depuis Mariano Rajoy ne veut pas entendre parler de ce statut d’autonomie.”.
“C’est un psychorigide qui s’accroche à la Constitution de 1978, une constitution qui devrait être révisée, elle a 40 ans, et le gouvernement central actuel ne le comprend pas.”. Même si au fil du temps, la Catalogne a obtenu des compétences de plus en plus grandes comme une police régionale.
Alors, poursuit François Zagoza, “Carles Puigdemont, qui court après son électorat et une majorité s’est dit puisque le gouvernement central ne veut pas nous écouter nous allons organiser un référendum.”. Il ne faut pas oublier non plus qu’une première “consultation” avait déjà été organisée en Catalogne qui avait débouché sur un “non”.
Cette fois, ce “référendum” rocambolesque organisé avec des urnes venues de Chine et transportées depuis la France, des Pyrénées orientales, a tenu du grand guignol. Et les résultats n’en sont pas crédibles. “En Catalogne il y a une forte minorité qui est peut être indépendantiste et une faible majorité qui ne l’est pas.“, estime François Zaragoza qui pour autant, condamne “avec la plus grande fermeté l’attitude du gouvernement de Madrid qui a envoyé la soldatesque, la garde civile, de triste mémoire. Elle a beaucoup changé, mais il y a de vieux réflexes. Des braves gens qui attendaient pour voter, persuadés d’être dans la légalité puisque le gouvernement catalan leur avait dit d’aller voter, ont été chargés par cette soldatesque de Rajoy”.
Populisme galopant
Quant à l’Europe bien embêtée dans cette affaire, elle peut difficilement intervenir. Si la Catalogne devenait indépendante, elle quitterait de facto l’Europe qui ne comprend que des Etats.
Depuis cet entretien réalisé vendredi, la situation évolue d’heure en heure en Espagne, plutôt dans le sens de l’apaisement. Alors que le chef du gouvernement catalan, Carles Puigdemont devait annoncer lundi les résultats du référendum et proclamer la déclaration d’indépendance, il a repoussé son intervention à mardi et il ne parle plus de passer ce Rubicon.
Quoi qu’il en soit, dans la foulée du brexit et des montées des extrémismes et des nationalismes en Europe, y compris en Allemagne, cet ultra-régionalisme en Catalogne, indissociable du repli et du refus de la solidarité, est une nouvelle manifestation d’un angoissant populisme ambiant sur le continent.
Ch.B
http://abonnes.lemonde.fr/europe/article/2017/10/07/le-reveil-de-la-majorite-silencieuse-catalane_5197652_3214.html